Les prostitué(e)s ont défilé jeudi après-midi pour protester contre le projet de loi qui prévoit la pénalisation des clients des travailleurs sexuels.
Au milieu des touristes, un drôle de cortège s’est formé jeudi place Pigalle. Aux cris de « Client pénalisés, putes en danger« , 200 personnes se sont réunies à l’appel du collectif Droits et prostitution, qui regroupe 17 associations de préventions et de santé communautaires (Act-up, Aides, Syndicat du travail sexuel-Strass…). Dans leur ligne de mire, le rapport de Michelle Bouquet (PS) présenté à l’Assemblée nationale, qui préconise, entre autres, de « créer un délit sanctionnant le recours à la prostitution ».
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Or, pour Sarah-Marie Maffesoli, juriste du collectif, « pénaliser les clients favoriserait les réseaux de prostitution, au détriment des travailleurs indépendants qui se retrancheraient dans des lieux cachés, s’éloigneraient des structures de soin et de prévention et n’oseraient pas porter plainte en cas de violences ».
[inrockstv 66120]
« Putes et clients, même combat »
La foule, souriante et potache, défile au son des slogans « On paie des impôts, c’est donc bien un vrai boulot » ou « Putes et clients, même combat ». Maîtresse Gilda, porte-parole du mouvement, qui s’époumone depuis plusieurs heures, est satisfaite :
« C’est une belle manifestation. il y a des gens qui sont venus de la France entière. De Limoges, de Toulouse, de Strasbourg, de Marseille. Et même d’Europe ! »
Comme Violet, 25 ans, tout juste arrivée de Londres. Escort depuis un ans, perruque bleue et look de geisha, elle ne changerait de métier « sous aucun prétexte« . « Je l’ai choisi, explique-t-elle. Je choisis mes clients, je choisis mes pratiques, et j’ai une qualité de vie qui me plait. »
Violet est consciente d’avoir une situation « privilégiée ». Car beaucoup de celles qui sont présentes à la marche travaillent dans la rue, dans des conditions « de plus en plus précaires« . Dans la foule, Diana, 45 ans, a le bras dans le plâtre. « Un homme est venu me voir, il m’a insultée puis m’a jetée à terre. Il voulait me prendre mon sac. » Originaire d’Equateur, la femme, qui travaille depuis quatre ans porte Dauphine, a déjà été agressée plusieurs fois :
« C’est devenu extrêmement dangereux. Certains hommes veulent te voler ou le faire gratuitement. Si tu refuses, ils deviennent agressifs. »
Des clients venus en soutien
Dans la foule, on aperçoit même certains clients. Comme Hippoplyte (un faux nom) : costume trois-pièces, chapeau haut de forme et visage dissimulé derrière un masque, il dit avoir « entre 50 et 60 ans » et est consommateur depuis « au moins 35 ans ».
« Ce n’est pas en niant le problème qu’il va disparaître. Cette loi va de toutes façons pénaliser les plus pauvres », déclare-t-il.
Après trois heures de marche, le cortège se termine place de la République. Les organisatrices appellent à une minute de silence en mémoire de ‘toutes celles qui sont mortes cette année’. Et Sarah-Marie Fassoli de conclure : « Le travail sexuel n’est pas une violence faite aux femmes. C’est les conditions d’exercice de ce travail qui le sont. »
Cerise Sudry-Le Dû
{"type":"Banniere-Basse"}