Avec Wallace & Gromit, un nouveau florilège de films d’animation : ingénieux et magnifiquement humain. C’est une histoire à la Miguel Indurain. Une histoire de leader modeste, écrasant de grâce et d’aisance. Usée jusqu’à la corde, la métaphore servira, sans hésitation, pour les studios Aardman de Bristol. Car c’est bien ici que se mitonnent depuis […]
Avec Wallace & Gromit, un nouveau florilège de films d’animation : ingénieux et magnifiquement humain.
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C’est une histoire à la Miguel Indurain. Une histoire de leader modeste, écrasant de grâce et d’aisance. Usée jusqu’à la corde, la métaphore servira, sans hésitation, pour les studios Aardman de Bristol. Car c’est bien ici que se mitonnent depuis vingt ans les mets de choix du cinéma d’animation, avec cette spécialité maison : la pâte à modeler. Il y a un peu plus d’un an, la « Collection Aardman 1 » avait déjà révélé quelques trésors d’humour et d’invention, et un authentique prodige : Nick Park, l’heureux papa de Wallace & Gromit. Aujourd’hui, ce deuxième volet, brillant panachage de vieilleries et de nouveautés, restitue la même divine et intrigante saveur. Les animateurs de chez Aardman appliquent une science précise du cadrage, de l’éclairage, du son, des bruitages. Toujours soucieux de raconter des histoires, de ne pas écrabouiller leur talent sous des tonnes de technique, ils relisent la réalité à leur manière, la travaillent selon leur sensibilité, jouent avec. Littéralement, ils la remodèlent en font carrément tout un monde. Rien de moins artificiel que ces décors fourmillant de détails, ces bouquets d’ombres et de lumières, ces personnages où la moindre expression, la moindre intonation sont bien senties. Comme si, sous la plasticine, le vivant courait toujours, le naturel rappliquait au galop. On ne cesse de les voir dans What’s pig de Peter Lord, fable médiévale où se retrouvent deux jumeaux pas vraiment ressemblants ; dans Early bird, tranche de vie d’un animateur radio du matin ; dans les bidonnants spots publicitaires de Nick Park où une tortue, des ours ou des cochons, interviewés dans leur cuisine ou leur salle de bains, justifient leur préférence pour le chauffage électrique. Les films Aardman fonctionnent à l’avenant : comme autant de sources de chaleur et d’humanité. Ainsi les cinq précieuses minutes de War story (signées Lord), où un certain Bill raconte sa vie à l’époque du Blitz, quand il pleuvait dru sur l’Angleterre des bombes, et toutes les emmerdes qui vont avec. Bill existe, Lord l’a rencontré et a enregistré ses paroles. La voix off, c’est la sienne. Il y a un moment où Bill, perdu dans une histoire de cave à charbon et de maison en pente, se prend les neurones dans ses souvenirs. Alors il se marre, d’un rire chaud et craquelé qui emmène tout sur son passage : le fil de l’intrigue, l’interviewer et nous avec. L’émotion filtre même à travers un film aussi stylisé que Not without my handbag, de Boris Kossmehl, conte fantastique et domestique à dormir debout une tantine distraite se retrouve en enfer pour avoir oublié de régler ses traites de machine à laver. Mais elle culmine avec A Close shave, de Nick Park : la troisième aventure de Wallace & Gromit est une bombe de drôlerie et d’imagination débridée, bourrée d’énergie vitale. Outre qu’il a mis dans cette histoire de moutons volés et de cyberchien de quoi se poiler et se réchauffer pour plusieurs hivers, Park démontre bien qu’il s’est créé un langage à part entière. Il a inventé là quelque chose comme le conte réel, le conte en chair et en os.
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