Aussi planant qu’une cigarette magique de Katmandou, A l’abri de leurs ailes est aussi simple et beau que l’envol d’un oiseau. Babas cool, réjouissez-vous, voilà un film pour vous. Bien qu’il n’ait sans doute jamais entendu le fameux hit de Pierre Perret Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux, Lakha l’applique à la lettre. Son boulot […]
Aussi planant qu’une cigarette magique de Katmandou, A l’abri de leurs ailes est aussi simple et beau que l’envol d’un oiseau.
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Babas cool, réjouissez-vous, voilà un film pour vous. Bien qu’il n’ait sans doute jamais entendu le fameux hit de Pierre Perret Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux, Lakha l’applique à la lettre. Son boulot est pourtant de capturer pour quelques roupies des oiseaux tropicaux dans les forêts près de Calcutta. Comme son père et son grand-père avant lui, il est censé exécuter ces gestes séculaires sans broncher. Mais Lakha est un poète, un innocent. La veille de sa mort, son fils Netai lui avait confié qu’il voulait enterrer un oiseau mort pour faire pousser un arbre à oiseaux. Lakha rêve souvent de cette scène primitive et se réveille en sursaut au milieu de la nuit. Sa femme, Sari, tente de le calmer, mais elle finit par se demander s’il n’a pas un grain (de millet). Elle n’arrive plus à faire bouillir la marmite et, surtout, elle sent que Lakha lui préfère les oiseaux.
Comme un baroud d’honneur, Lakha tente une dernière fois d’en vendre à un marchand de Calcutta. Mais lorsqu’il s’aperçoit que le commerçant n’hésite pas à les servir en civet, il craque définitivement. Sa femme aussi : elle le quitte pour un autre. Avant de partir, elle s’inquiète : « Comment vas-tu vivre ? » Et Lakha de répondre en regardant le ciel : « Il y a la terre, les marécages, le ciel et les oiseaux. Ils prendront tous soin de moi. Ce n’est qu’une vie… Elle passera. »
Bien sûr, ceux qui ont épuisé leur réserve de cigarettes magiques from Katmandou ressentiront peut-être quelques baisses de tension. Mais l’enjeu est ailleurs. Comme son héros, Buddhadeb Dasgupta est un poète, un vrai. Avec limpidité, il filme l’universel conflit entre matérialité et spiritualité, la quête de la liberté et le renoncement. Sa caméra s’enroule avec fluidité autour des acteurs à la manière d’un Ophuls ou, plus près de nous, d’un Téchiné. Mais le cinéaste auquel on pense le plus est Jean Renoir qui, rappelons-le, avait tourné Le Fleuve aux Indes et déclenché par la même occasion la vocation de Satyajit Ray. Même présence sensuelle de la nature, en particulier du fleuve, même sensibilité à l’épiderme sonore et visuel de la réalité.
A l’abri de leurs ailes s’ouvre et se ferme sur la main de Lakha lâchant un oiseau vers le ciel. Un geste simple et beau. Comme le film.
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