Jude est l’adaptation du roman de Thomas Hardy, Jude l’obscur : au siècle dernier, l’ascension sociale d’un jeune campagnard anglais, contrariée par les barrières de classes et les préjugés moraux. Michael Winterbottom a évacué l’obscurité non seulement du titre mais aussi du film. Parce que son grand truc, à Michel Hivernalpostérieur, c’est l’image choc, celle […]
Jude est l’adaptation du roman de Thomas Hardy, Jude l’obscur : au siècle dernier, l’ascension sociale d’un jeune campagnard anglais, contrariée par les barrières de classes et les préjugés moraux. Michael Winterbottom a évacué l’obscurité non seulement du titre mais aussi du film. Parce que son grand truc, à Michel Hivernalpostérieur, c’est l’image choc, celle qui coupe le souffle du spectateur et lui revient en mémoire longtemps après la projection. Ainsi, il y a un an, avec Butterfly kiss, il frappait les rétines avec une héroïne psychopathe dénudant face à la caméra un corps bardé de chaînes cadenassées jusqu’à la meurtrissure. Cette fois, il orchestre un crescendo dans le shocking pour dessiller nos yeux fatigués. D’abord, un cochon abattu, pendu et saigné sans ellipse. Puis, le sexe ensanglanté de Kate Winslet après l’accouchement. Et enfin, le suicide par pendaison des trois enfants persuadés qu’ils sont responsables des tracas matériels de leurs parents. Malgré ces trois coups dans l’estomac, le film suinte le gongorisme râpé. Les premières scènes montrent le héros enfant dans un noir et blanc ultra-contrasté renvoyant à l’imagerie chic des clips. Les différentes époques vont ainsi se succéder dans un traitement visuel pléonastique dont l’apprêt interdit au film de décoller. L’auteur a sûrement imaginé que quelques images audacieuses empêcheraient son film de sombrer dans l’académisme formel le plus rébarbatif. Mais le traumatique n’empêche pas le chromatique. Trouver un style qui convienne à l’histoire demandait davantage d’efforts et d’autres audaces. Une anecdote illustre cette limite. Michael Winterbottom a singulièrement ramassé la fin du roman, « sinon, dit-il, le film aurait duré trois heures ». Et alors ? En 1979, Roman Polanski adaptait Tess d’Uberville du même Thomas Hardy et son film totalisait précisément trois heures. Sans doute Polanski avait-il estimé que l’histoire nécessitait cette durée contraire aux normes commerciales. C’est, semble-t-il, toute la différence entre un auteur et un faiseur. Autrement dit, quitte à parier sur un cul (comme on dit dans le monde merveilleux du mannequinat), on préférera l’adaptation de l’auteur de Cul-de-sac à celle de son collègue Culd’hiver.
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