Produites par la Lesbian & Gay Pride Films (et Little Bear), déjà diffusées à la télévision, ces dix histoires se proposent de “mettre en scène la difficulté et le bonheur de vivre sa sexualité et d’exprimer ses sentiments, en France, aujourd’hui”. Par-delà la pertinence toujours discutable de plier la création au service volontariste d’une cause, […]
Produites par la Lesbian & Gay Pride Films (et Little Bear), déjà diffusées à la télévision, ces dix histoires se proposent de « mettre en scène la difficulté et le bonheur de vivre sa sexualité et d’exprimer ses sentiments, en France, aujourd’hui ». Par-delà la pertinence toujours discutable de plier la création au service volontariste d’une cause, fût-elle estimable, ce qui nous intéresse est de savoir si cette ambition programmatique a su faire jaillir du cinéma. Réponse affirmative, ce qui justifie une sortie en salles.
L’Amour est à réinventer ne surprend pas en ce sens où les cinéastes les plus attendus se montrent en effet les meilleurs. A commencer par Philippe Faucon qui met son regard dénué d’effet au service d’une hypothèse fantastique à la Demy : un jeune homme tombe enceint et demande à son compagnon de lui ramener du caviar pour satisfaire une envie subite. Avec beaucoup d’humour, de légèreté, de précision et en transposant l’ordinaire hétéro dans le virtuel homo (attendre un enfant), Faucon montre les gestes d’attention quotidiens qui font le tissu d’une relation de couple. Marion Vernoux a imaginé une situation originale et émouvante : un type confie à son caméscope l’inventaire de tout ce qu’il aurait pu vivre s’il n’avait pas le sida. Avec cette petite ode aux rêves conditionnels, Vernoux retrouve le dynamisme de Personne ne m’aime. A partir d’un texte anonyme sur un homme qui raconte au passé sa brève relation amoureuse avec un autre homme malade du sida, Paul Vecchiali réussit un film solaire et poétique sur le souvenir, une oeuvre élégiaque et sensuelle sur la fugacité insaisissable du bonheur. Jean-Claude Guiguet commence par une balade en vélo à travers la nuit parisienne, mouvement de cinéma plein d’élan, d’allégresse et de bonheur de vivre. Mais le cycliste rejoint son ami sur un lit d’hôpital. Avec peu de mots et sans pathos, dans une sobre économie des regards et des gestes, Guiguet fait passer une riche palette de sentiments contradictoires où se percutent le désir et l’amour, la douleur et le bonheur d’aimer, le combat de la vie contre la mort. Et réussit à poser des personnages, leur monde et son regard en l’espace exigu de cinq minutes.
10 films courts de François Dupeyron, Pierre Salvadori, Philippe Faucon, Anne Fontaine, Françoise Decaux Thomelet, Marion Vernoux, Paul Vecchiali, Merzak Allouache, Nils Tavernier et Jean-Claude Guigueto