On pourrait s’imaginer, devant les clameurs enthousiastes des festivaliers qui ont salué la présentation d’Harry, que Dominik Moll s’est résolu à se draper dans l’air du temps. Ce n’est qu’une demi-vérité : les fibres qui constituent ses films suintent toujours autant l’angoisse. Que la menace s’hydrate désormais aux sources de la comédie, et que le […]
On pourrait s’imaginer, devant les clameurs enthousiastes des festivaliers qui ont salué la présentation d’Harry, que Dominik Moll s’est résolu à se draper dans l’air du temps. Ce n’est qu’une demi-vérité : les fibres qui constituent ses films suintent toujours autant l’angoisse. Que la menace s’hydrate désormais aux sources de la comédie, et que le flou et le flottement puissent, nullement dénaturés, subsister au sein d’un scénario irréprochable, encourage à penser que Moll, loin de renier ses séminales expérimentations, s’accomplit en cinéaste alchimiste, nouveau maître de l’hybridation des genres. Moll prend soin de semer le doute et la discorde dans cette comédie de moeurs, de la parasiter de micro-événements qui sont autant de signaux d’alarme : un puisard au fond du jardin, qu’il serait judicieux de boucher au plus vite ; une salle de bains fuchsia, totalement incongrue dans cette demeure à rénover, mais où l’on se plaît à se cloîtrer ; les étonnantes propriétés d’un oeuf cru gobé après l’orgasme ; et cette tuyauterie crachotante qui atteste que le dérèglement est en marche. Ensuite, il suffira de plans répétés sur la maison dans la nuit ou d’un hitchcockien travelling avant sur un interphone (remember le verre de lait de Soupçons ?) En plus du soutien sans faille de ses comédiens, la force d’Harry réside aussi dans le fait de ne jamais sacrifier un personnage pour en tirer un quelconque dividende. Le cinéma de Dominik Moll n’a pas fini de nous faire du bien.
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