Guillaume Bachelay, rapporteur général de “Changement”, le projet du PS pour la présidentielle, revient sur l’élaboration de ce texte.
Le PS engage un tour de France afin d’expliquer son projet pour la présidentielle et le publie sous forme de livre de poche. Comment donner envie aux Français de vous suivre dans « Le Changement », titre du projet socialiste ?
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Guillaume Bachelay – En montrant qu’une autre politique est possible. Notre pays vit une panne d’avenir comme jamais depuis la fin de la guerre. Panne d’avenir pour les couches populaires et les classes moyennes : l’ascenseur social est bloqué au rez-de-chaussée et quand il marche, c’est à la descente pour les jeunes générations. Panne d’avenir aussi pour la France dans la mondialisation, face à la Chine, l’Inde et les autres nouvelles puissances.
Deux chemins sont devant nous. Soit le chemin des droites et ultradroites européennes, du sarkozysme en France, celui du moins disant social et écologique, de l’abaissement économique et culturel, de la surenchère autoritaire et ethnique. Soit le chemin du redressement fondé sur un nouveau modèle de production soucieux de l’humain et de la planète, une réorientation des politiques européennes, une plus grande justice sociale et fiscale, une lutte acharnée contre le chômage, le mal-logement et la pauvreté. En 2012, il y aura davantage qu’une élection : une vraie bifurcation !
Jusqu’à aujourd’hui, le PS n’a pas assumé trois ruptures dans son histoire : le tournant de la rigueur en 1983, le séisme du 21 avril 2002 et le non à la Constitution européenne en 2005. Est-ce que ce texte permet de tourner la page ?
Pour préparer l’avenir, il faut tirer les leçons de l’expérience. Les moments que vous évoquez ont un point commun : l’épuisement de la social-démocratie traditionnelle en Europe. Elle a permis des conquêtes magnifiques, qu’il s’agisse du droit du travail ou de la protection sociale. Mais depuis trente ans, le rapport de force s’est inversé entre les profits et les salaires, le court terme et le temps long. Faute de lucidité ou de volonté, les gauches européennes n’ont pas su inverser la donne : les uns, emmenés par Tony Blair, s’en sont accommodés, les autres, comme la gauche française, ont tenté de résister.
La crise du capitalisme financier met un coup d’arrêt à ce cycle néolibéral. A la gauche de reprendre l’avantage dans la bataille des idées ! C’est pourquoi notre projet est républicain, social-écologique et alter-européen. Face au marché, nous plaidons pour un nouvel interventionnisme de la puissance publique : l’Etat pour encadrer les loyers ou taxer les superprofits des groupes pétroliers afin de développer les énergies renouvelables, les collectivités locales pour mieux prendre en charge la petite enfance et lutter contre les déserts médicaux, l’Europe pour protéger ses entreprises et harmoniser sa fiscalité, les instances multilatérales pour combattre les paradis fiscaux.
Pour élaborer ce projet, vous avez rencontré l’ensemble des responsables socialistes de Ségolène Royal à François Hollande, en passant par Lionel Jospin et Pierre Mauroy. Qu’en avez-vous tiré ?
Comment rassembler le pays si nous ne sommes pas nous-mêmes unis autour de propositions partagées ? Ce travail collectif voulu par Martine Aubry a permis de vérifier des intuitions, d’écarter des options, d’élaborer des solutions, de clarifier certaines positions. Surtout, à l’heure de rédiger, je me suis dit qu’il fallait restituer ce que nos discussions avaient de plus fort : l’envie d’une alternative et pas seulement d’une alternance.
A 36 ans, vous faites partie de la nouvelle génération du PS. Pensez-vous avoir apporté un regard différent ?
J’écris comme je suis. L’élu d’une commune, Cléon, et d’une région, la Haute-Normandie, qui se battent pour sauver les emplois industriels, investir dans la formation et l’innovation, rendre plus écologiques nos façons de vivre, de produire. Je refuse de voir mon pays devenir le musée du village global. Vous imaginez une nation sans usines, sans paysans, sans universités, sans laboratoires de recherche ? Quel cauchemar, quel drame aussi ! Ce que j’ai mis de moi dans notre projet, c’est cette colère et ce combat.
Recueilli par Marion Mourgue
Le Changement (OdileJacob), 128 pages, 3€.
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