De passage à Paris la semaine dernière, le patron du FMI a multiplié les contacts avec les dirigeants socialistes. La préparation de sa candidature se poursuit dans une discrétion très travaillée.
Rendez-vous secrets, agenda mystère, silence médiatique… Désormais, Dominique Strauss-Kahn ne sème plus de « petits cailloux » sur la route qui le conduit vers une candidature à l’élection présidentielle. Mais le directeur général du FMI a franchi une nouvelle étape dans la préparation de son retour en France lors de son séjour à Paris la semaine dernière.
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« C’étaient des jours d’écoute, il voulait reprendre contact, entendre les responsables socialistes, les grands élus locaux, savoir ce qu’ils avaient à lui dire sur le parti, sur l’état du pays, après les cantonales », explique un de ses proches.
DSK a aussi déjeuné avec des membres de la rédaction du quotidien Libération et de l’hebdomadaire Marianne, chambres d’écho importantes pour la campagne de la primaire PS.
« Les rendez-vous les plus importants sont ceux dont vous n’entendez pas parler »
DSK, candidat clandestin ? Un mot, une phrase suffisent pour qu’il trouve un carton de déménagement sur son bureau de Washington, au nom de la règle de fer du « you got one hour to pack ». Le FMI lui interdit toute incursion dans la vie politique de son pays. Mais comme à chacun de ses passages en France, Dominique Strauss-Kahn a flirté avec la ligne blanche.
Retracer l’agenda du patron du FMI suscite toutefois les commentaires amusés de ses soutiens : « Les rendez-vous les plus importants sont ceux dont vous n’entendez pas parler ! » Mardi 26 avril, DSK a rencontré Laurent Fabius, l’un de ses contacts réguliers depuis qu’ils ont aplani leurs différends sur l’Europe. L’ex-Premier ministre est aussi le ciment du « pacte de Marrakech » qui veut que le directeur général du FMI et la première secrétaire du PS ne s’affrontent pas. Dominique Strauss-Kahn a d’ailleurs rencontré « plusieurs fois » Martine Aubry lors de son séjour parisien. « Leur pacte, c’est du béton, il règne un excellent climat entre eux », souligne un strauss-kahnien.
Mercredi 27 avril, le patron du FMI et la première secrétaire du PS se sont longuement entretenus dans l’appartement parisien de Martine Aubry, non loin de Montparnasse. Le lendemain, DSK a rencontré Benoît Hamon, que ses amis pressent de s’engager dans la primaire si Martine Aubry n’est pas candidate.
« Benoît est le seul qui peut donner à DSK le label candidat de gauche », estime un proche du porte-parole du PS. Dominique Strauss-Kahn a aussi eu « un contact » avec Ségolène Royal, même s’il ne l’a pas rencontrée, et a discuté avec les « grands élus » Michel Destot et Gérard Collomb, maires de Grenoble et de Lyon.
« Ca va secouer fort » quand il reviendra en France
Selon certains proches de DSK, il a vu François Hollande. Une rencontre non confirmée par le candidat à la primaire du PS qui mène tambour battant sa propre campagne. Cette démarche a fortement irrité les strauss-kahniens Jean-Marie Le Guen et Jean-Christophe Cambadélis. Mais leurs déclarations musclées contre l’ancien patron du parti ont déplu à DSK, qui les a rappelés à l’ordre. « Ce n’est pas l’attitude qu’il veut avoir par rapport à François Hollande », explique un autre de ses proches.
L’épisode illustre tout de même la tension entre les deux camps. Le député de Corrèze reconnaît d’ailleurs que « ça va secouer fort » au moment où DSK reviendra. Plusieurs de ses amis font déjà l’objet de tentatives de séduction de la part des strauss-kahniens qui veulent l’isoler, voire le décourager, avant la primaire.
Les grandes manoeuvres autour de ces élus étiquetés « hollandais » s’inscrivent dans une stratégie plus globale d’organisation des troupes strauss-kahniennes.
« Mettez ça sur le compte de l’instinct grégaire. Il y a un besoin d’échanger avec les autres, que les voix ne soient pas trop discordantes », explique un participant aux réunions.
Le 6 avril, une soixantaine de parlementaires, députés et sénateurs, présidents d’agglomérations, présidents de conseils généraux, élus de grandes villes s’étaient donné rendez-vous dans le salon Mars de l’Assemblée nationale. « Une manière de déterminer comment on gère la période qui s’ouvre jusqu’à la mi-juin », confie le sénateur François Patriat, l’un des participants, qui a assisté le 3 mai à une réunion similaire organisée à l’initiative de Pierre Moscovici au Sénat.
Une réunion pour « surveiller la sauce »
Tous les quinze jours, François Patriat organise aussi un petit déjeuner au restaurant du Sénat, auquel assistent désormais une trentaine d’élus.
Autre réunion, le 26 avril, à l’Assemblée, ils étaient une dizaine autour de la table. Parmi eux, des strauss-kahniens de la première heure, Le Guen, Cambadélis et Moscovici, mais aussi des « petits nouveaux », comme Jack Lang ou Claude Bartolone. « C’était une réunion pour surveiller la sauce plutôt que pour y ajouter des ingrédients », confie l’un des participants. « Tous avaient la volonté de ne pas braquer Martine Aubry. L’idée, c’est de ne surtout pas polluer son week-end du 28 mai avec la convention du PS sur le projet. » Ce que confirme un proche de DSK : « Mai sera le mois du projet et juin celui des candidatures. »
« Aujourd’hui, Dominique est directeur du FMI mais le brouillard se dissipe sur son retour », précise un strauss-kahnien. « Tout ce que la presse écrit, tout ce qu’on lui dit lui fait une masse d’infos, qui lui sert pour ne pas louper son atterrissage », ajoute un des amis du patron du FMI. « C’est le minimum de dire qu’il ne devrait pas y avoir d’improvisation. »
Les proches de DSK nient pourtant toute accélération du calendrier, en dépit du « problème Hollande ». Dominique Strauss-Kahn devrait donc assister au G8 de Deauville, fin mai, laisser Martine Aubry conclure le travail sur le programme socialiste, et entrer en scène dans la deuxième quinzaine de juin. « Il est dans une situation inverse des autres candidats, il n’a pas à faire la démonstration de sa crédibilité. Il ne va pas faire quatre meetings par semaine ! », explique un de ses soutiens. « Il n’est pas candidat à la primaire, il est candidat à la présidence de la République », souligne un autre partisan de DSK.
Un strauss-kahnien s’amuse : « Si jamais il devait se déclarer candidat le 13 juillet, qu’est-ce qu’on fait les 14 et 15 ? Mis à part louer une caravane commerciale et lancer des camemberts Président, ce qui est par ailleurs une hypothèse à laquelle nous avons pensé… »
Hélène Fontanaud & Marion Mourgue
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