Le prix de l’indépendance et de l’originalité fête ses soixante ans en consacrant l’un des cinéastes français les plus passionnants : Rabah Ameur-Zaïmeche.
Le prix Jean Vigo, qui récompense « un auteur d’avenir », a été décerné mercredi matin au cinéaste franco-algérien Rabah Ameur-Zaïmeche pour son dernier long métrage, Les Chants de Mandrin. Le film succède ainsi à Un poison violent de Katell Quillévéré au palmarès, et sera déjà auréolé d’un succès pour sa sortie en salles (prévue courant 2011).
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Annoncé un temps à Cannes, Les Chants de Mandrin marque une nouvelle étape dans la –jeune– carrière de Rabah Ameur-Zaïmeche. C’est un premier film d’époque, tourné en costume, qui vient clore une trilogie urbaine et hyper-contemporaine initiée en 2001 avec Wesh Wesh, qu’est-ce qui se passe ?, puis Bled Number One et le puissant Dernier maquis (tous deux sélectionnés à Cannes).
Le cinéaste contrebandier
Coproduit par la France, la Belgique et l’Espagne, le quatrième long métrage de Rabah Ameur-Zaïmeche a été tourné en huit semaines dans l’Aveyron. Comme sur ses précédents films, le réalisateur a lui-même écrit le scénario de cette fresque historique, qui démarre au XVIIIe siècle, au moment de l’exécution du célèbre hors-la loi Louis Mandrin, et embraye sur une nouvelle campagne de contrebande organisée par ses sbires.
« Avec ce quatrième long métrage, Rabah s’impose comme un grand cinéaste, commente le comité du Prix Jean Vigo. Nous saluons sa liberté, sa poésie et son esprit de joyeuse contrebande. »
Car si Les Chants de Mandrin est un film d’époque (pré-révolutionnaire), rien ne semble avoir détourné Rabah Ameur-Zaïmeche de ses préoccupations politiques, et le cinéaste ne devrait certainement pas céder aux sirènes de la reconstitution fidèle. Le film serait plutôt un patchwork anachronique d’influences diverses, où l’on annonce déjà des citations de Lautréamont, Rimbaud et…The Clash.
Des prix d’encouragement
« Pour une incongruité et une audace peu commune dans un premier film », le comité du Prix Jean Vigo a aussi distingué le court métrage La Dame au chien de Damien Manivel. Il rejoint un palmarès impressionnant de courts métrages primés depuis 1960 : entre La Jetée de Chris marker, La Vie des morts d’Arnaud Desplechin, Ce vieux rêve qui bouge d’Alain Guiraudie ou le Silêncio de F. J. Ossang. Plusieurs « paris » récompensés pour le Prix Jean Vigo, qui a tenu à rappeler sa vocation première à l’occasion de ses 60 ans :
« La singularité des Prix Jean Vigo n’est pas de récompenser un ‘excellent film’, mais d’encourager un auteur d’avenir. L’œuvre peut montrer des faiblesses, des maladresses, des longueurs. Il suffit d’y découvrir une passion et un don. Les Vigo ne sont pas des prix de consécration. Ils sont des prix d’encouragement. »
Longtemps oublié du palmarès, Jean-Marie Straub reçoit aussi à l’occasion de cet anniversaire un Prix spécial « pour avoir su maintenir au fil d’une œuvre exemplaire une ligne de conduite indépendante, originale et toujours novatrice ». Un Prix d’encouragement à continuer, en somme, pour le jeune filmeur d’O somma luce.
Romain Blondeau
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