Après onze ans d’existence, la Cinémathèque semble peu encline à valoriser les femmes. Depuis septembre 2005, date de son installation au parc de Bercy, seulement six rétrospectives féminines ont été réalisées, pour zéro expositions.
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22 programmations féminines pour un total de 305
Le site Buzzfeed a décidé d’enquêter sur le sujet suite à la publication d’un article par Le Genre et l’Ecran, blog féministe dédié au cinéma. Le 16 février dernier, ils mettaient en ligne une tribune intitulée Cinémathèque : Dorothy Arzner dans l’œil du sexisme, et démontraient l’apparent sexisme présent dans le catalogue d’exposition de sa rétrospective.
Manon Enghien, l’auteur de l’article, déclare à ce propos : « La Cinémathèque française organise la rétrospective d’une réalisatrice pour mieux la dévaloriser ». Elle poursuit : « L’institution est connue pour sa réticence à rendre hommage aux réalisatrices ».
Après une fouille poussée de la programmation disponible sur leur site, les résultats semblent alarmants. Du côté des rétrospectives, six réalisatrices ont été mises à l’honneur : Dorothy Arzner, Michèle Rosier, Annett Wolf, Caroline Champetier, Naomi Kawase, Catherine Breillat.
Cinq actrices ayant réalisé des films ont également eu le droit à des rétrospectives : Jane Birkin, Christine Pascal, Juliet Berto, Delphine Seyrig, Jeanne Moreau.
Dix actrices supplémentaires ont été abordées (Ingrid Bergman, Bernadette Lafont, Bette Davis, Bulle Ogier, Pola Negri, Danielle Darrieux, Juliette Binoche, Ida Lupino, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert), ainsi qu’une pionnière des archives cinématographiques, Kashiko Kawakita.
Sur 305 programmations au total, seules 22 sont donc dédiées aux femmes. 198 sont dédiées aux hommes, et 100 à des thématiques générales (« Le mélodrame français », « Le cinéma à Singapour »…). Sur les 18 expositions organisées, aucune n’est consacrée aux femmes.
« Ce n’est que le reflet de l’histoire du cinéma mondial »
Contacté par Buzzfeed, le directeur de la cinémathèque, Frédéric Bonnaud, répond aux accusations :
« Je compte quatre rétrospectives de femmes sur la dernière année, je ne pense pas que depuis 2005 on ne trouve que trois autres cycles consacrés à des réalisatrices. Ce n’est pas possible. Avant d’être le directeur, j’ai été journaliste et j’ai assisté à un certain nombre de présentation de cycle de femmes, je vous assure qu’il y en avait plus. »
Il poursuit :
« C’est un mauvais procès que l’on nous fait. Ce n’est que le reflet de l’histoire du cinéma mondiale, qui a été incroyablement machiste »
Avant de détailler :
« La Cinémathèque est une institution patrimoniale. Il nous arrive de parler du cinéma du présent mais on parle surtout du cinéma du passé. Si vous regardez l’histoire du cinéma, il est évident que de manière extrêmement massive, pour des raisons sociales, culturelles et de domination masculine, il y a eu infiniment plus de cinéastes ou de producteurs hommes que femmes. »
Au moment de son investiture, Frédéric Bonnaud, avait déclaré en citant Truffaut : « Le cinéma c’est de l’art de faire faire de jolies choses à de jolies femmes ». Il serait peut-être temps de dépasser ce cliché pour mettre en avant le travail des réalisatrices.
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