Une transposition aussi hilarante que pince-sans-rire du film noir, avec un tueur black, zen, féru de pigeons et de rap. Négociant avec brio l’après-Dead Man, sommet indépassé de son œuvre, Jarmusch propose sa propre lecture du film noir, intensément décalée, comme il se doit. Une sorte de mixte du Samouraï de Melville et des Soprano, […]
Une transposition aussi hilarante que pince-sans-rire du film noir, avec un tueur black, zen, féru de pigeons et de rap.
Négociant avec brio l’après-Dead Man, sommet indépassé de son œuvre, Jarmusch propose sa propre lecture du film noir, intensément décalée, comme il se doit. Une sorte de mixte du Samouraï de Melville et des Soprano, pulsée par la démarche chaloupée de l’inimitable Forest Whitaker, qui épouse idéalement le hip-hop languide de RZA du Wu-Tang Clan. Jarmusch renouvelle le genre grâce au personnage de Ghost Dog (Forest Whitaker), tueur à gages ne jurant que par les préceptes du Hagakuré, le livre secret des samouraïs et maniant le sabre avec art. Son jardin secret, c’est l’élevage de pigeons sur le toit de son immeuble.
Une référence (en l’occurrence Sur les quais de Kazan) parmi toutes celles dont ce film est truffé. Notamment, la filiation évidente avec les films de sabre nippons, sans oublier la comédie et le dessin animé qui font ici de plaisantes incursions. Même si l’on retrouve une constante évidente du cinéma de Jarmusch dont les héros sont avant tout des voyageurs, des déambulateurs comme ceux de Tarkovski, curieusement , filmés en travelling, en train de marcher, certains indices font craindre que Jarmusch soit en train de perdre sa singularité. Voir par exemple son retour à la couleur, qui lui avait jusque là moins réussi que le noir et blanc, ou son recours au fondu enchaîné. La construction narrative aussi est plus ordinaire, avec un leitmotiv faible, celui du marchand de glaces hilare s’exprimant en français. Finalement, le véritable atout de Ghost Dog c’est le héros lui-même, gros nounours éthique et mystique.