“Ce qu’on paie aujourd’hui, c’est ni plus ni moins quinze ans d’absence de réflexion idéologique au sens noble du terme. ll y a dix ans, quand Ségolène Royal a essayé de réinventer quelque chose autour de “l’ordre juste” et de la “démocratie participative”, toute la direction du PS l’a moquée. Après sa défaite, en 2007, on […]
« Ce qu’on paie aujourd’hui, c’est ni plus ni moins quinze ans d’absence de réflexion idéologique au sens noble du terme. ll y a dix ans, quand Ségolène Royal a essayé de réinventer quelque chose autour de « l’ordre juste » et de la « démocratie participative », toute la direction du PS l’a moquée. Après sa défaite, en 2007, on a mis le couvercle sur toutes les idées nouvelles, on est revenu à un discours très traditionnel et au fond très paresseux. On a pris, collectivement, des années de retard sur la société. » Ce constat, aussi cinglant qu’équivoque sur l’état du PS après quatre ans de présidence de François Hollande est dressé par Dominique Bertinotti, ministre déléguée à la famille de mai 2012 à mars 2014.
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« Comment en est-on arrivé là ? »
Comme elle, plusieurs anciens ministres ont répondu à la question posée par le quotidien Le Monde : « Comment en est-on arrivé là ? » A moins d’un an de l’élection présidentielle de 2017, pointe l’heure du bilan pour le président de la République. Affaibli et impopulaire, il concentre sur sa personne (ainsi que son binôme de l’exécutif, Manuel Valls), une considérable portion de la révolte des Français qui a montré, de Nuit debout aux manifestions contre la loi El Khomri, les fruits de son mécontentement.
A moins d’un an, donc, les langues se délient. Elles ne sont pourtant pas toutes rancunières envers le président de la République. Pour Nicole Bricq, chargée de l’écologie puis du commerce extérieur, il faut aller chercher la source de l’impopularité en 2002, après la défaite de Jospin à la présidentielle :
« Nous, socialistes, devons reconnaître que nous n’avons pas assez travaillé avant 2012. Regardez la déclaration de principes que le PS a publiée en 2008 : pour la première fois, il est dit très clairement que nous assumons l’économie de marché. Or, pendant la campagne présidentielle, on n’en a pas tiré toutes les conséquences ; on n’a pas intégré la réflexion de Blum sur l’articulation entre conquête et exercice du pouvoir. Si tout avait été clair au moment de l’élection, les frondeurs n’auraient pas existé, et ça nous aurait évité tout un tas de problèmes depuis quatre ans. »
Un constat d’échec profond qui ne dédouane pas pour autant François Hollande, premier secrétaire du PS de 1997 à 2008. D’autres ministres considèrent eux qu’il y a eu des « erreurs de castings » au gré des nominations et remaniements. Parmi eux, Benoît Hamon ou Thierry Repentin. Ce dernier évoquant d’ailleurs « un PS totalement absent pour accompagner le gouvernement auprès de l’opinion », dans la première période du mandat (avant la nomination de Manuel Valls à la place de Jean-Marc Ayrault au poste de Premier ministre en 2014).
Des erreurs de castings
Un autre point est à souligner au moment de dresser ce terne bilan socialiste: des erreurs dans la « dramaturgie » ou de « story telling », souligne Le Monde, qui n’auraient qu’accentue le fosse creusé entre le gouvernement et les Français. De l’affaire Cahuzac à l’absence de discours fondateur de François Hollande, en passant par la non-prise en compte d’un rapport « extrêmement sombre » de la cour des Comptes, selon Marylise Lebranchu (ancienne ministre de la décentralisation, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat) sur la santé économique de la France, les erreurs furent nombreuses et non sans conséquence.
Enfin – et c’est peut-être le plus grave – beaucoup dénoncent un manque d’esprit collectif au sein du gouvernement, qui les a entraînés dans cette chute programmée.
« Dès le début, ce qui m’a frappé, c’est l’absence de ciment politique dans l’équipe, se souvient Benoît Hamon. Chacun y allait avec ses notes (…) chacun était dans son couloir de nage (…) On clôt le débat avant même qu’il n’ait lieu. C’est la tyrannie du PowerPoint qui tue l’action politique. (…)L’histoire de ce quinquennat, au fond, est celle d’une impuissance volontaire. »
Ce qui s’est traduit selon Dominique Bertinotti et de nombreux autres anciens ministres par une prise de distance, progressive, des engagements de la campagne présidentielle de François Hollande, comme on a pu le voir avec le projet de loi El Khomri que beaucoup de militants n’estiment pas de gauche.
A moins d’un an de la présidentielle, il faudra plus, bien plus que de bons résultats pour l’équipe de France de football lors de l’Euro qui débutera le 10 juin prochain, pour permettre à François Hollande et au PS, de remonter la pente. S’il n’est pas trop tard.
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