La quasi-totalité des terroristes de 2015 sur le sol français sont issus des zones urbaines sensibles (ZUP). Le chercheur Pierre Beckouche alerte, mercredi 30 décembre dans Libération, sur ce constat glaçant. Faut-il en conclure que les quartiers populaires sont des fabriques à djihadistes ? L’universitaire balaie ce raccourci. L’islamisme ne serait qu’une déviance, au même […]
La quasi-totalité des terroristes de 2015 sur le sol français sont issus des zones urbaines sensibles (ZUP). Le chercheur Pierre Beckouche alerte, mercredi 30 décembre dans Libération, sur ce constat glaçant.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Faut-il en conclure que les quartiers populaires sont des fabriques à djihadistes ? L’universitaire balaie ce raccourci. L’islamisme ne serait qu’une déviance, au même titre que « l’anomie, la drogue, la délinquance, le banditisme, la marginalité ». Il enjoint le monde universitaire à analyser d’urgence « les insuffisances de la cohésion sociale française et les échecs de l’action publique en direction des couches populaires. »
Deux phénomènes permettent d’expliquer, selon ce professeur de géographie à Paris 1, l »apartheid territorial, social et ethnique » déploré par Manuel Valls en janvier dernier. Tout d’abord, l’école ne remplit pas sa fonction républicaine mais entérine l’élitisme « au lieu de se consacrer, prioritairement, aux enfants déclassés – et qui se trouvent être souvent issus de familles musulmanes ». A cela s’ajoute l’urbanisation excessive des couches populaires sur des espaces que les élus locaux ne peuvent plus maîtriser seuls.
Une jeunesse enfermée dans un « contre-monde »
« Au-delà de quelques milliers d’islamistes », c’est toute une jeunesse qui souffrirait de « déculturation ». Il estime que des centaines de milliers de jeunes Français sont coincés dans ce que le sociologue Didier Lapeyronnie appelle un « contre-monde ». Que ce soit à Grigny en Essonne (Amedy Coulibaly), à la Meinau à Strasbourg (Foued Mohamed-Aggad) ou à la cité des 3000 à Aulnay-sous-Bois (Hasna Aït Boulahcen).
Le reste des terroristes français ayant sévi en 2015 sont originaires de communes pauvres : Epinay-sur-Seine et Saint-Denis pour le logeur Jawad Bendaoud, Drancy pour Samy Amimou, trois communes de Seine-Saint-Denis.
Interrogé en janvier dernier, le sociologue franco-iranien Farhad Khosrokhavar, jugeait dépassé le concept de politique territoriale : « La critique qui devrait être faite est celle de mener des politiques territoriales et non des politiques qui visent à renforcer les “capacités” des gens. “People” plutôt que “place” pour parler comme les Américains. »
Du temps et de l’argent. Beaucoup. Voilà ce que préconise Pierre Benkouche : « Ce ne sont pas les mesurettes des ministres de l’Education nationale successifs qui y répondront ; l’enjeu urbanistique ne se chiffre pas en centaines de millions d’euros (plan Valls) mais en centaines de milliards ; l’action ne saurait porter sur les deux ans qui nous séparent de la prochaine élection mais sur les deux décennies qui viennent. »
De nouveaux profils en province
Si l’on s’intéresse plus largement aux djihadistes français partis en Syrie ou Irak, il faut signaler, à l’image de M. Khosrokhavar, un nouveau profil : celui des jeune de classes moyennes nés en province, récemment convertis à l’islam. C’est le cas de Reda El Ayachi, jeune homme de 18 ans, originaire de la banlieue de Caen, dont la mort a été confirmée il y a trois jours. Si aucune personne de ce type n’est à l’heure actuelle revenue en Europe commettre des attentats, leur émergence pose question.
En 2014, le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI), un organisme privée créé par Dounia Bouzar, avait publié un rapport sur l’origine sociale des jeunes radicalisés ou en voie de l’être. 67% des familles seraient issues des classes moyennes, 16% des classes populaires et 17% des classes supérieures.
{"type":"Banniere-Basse"}