Fidèle à sa nature revendiquée de faiseur au service des genres et des histoires qu’on lui propose, Stephen Frears essaie ici de renouveler avec le western l’opération qui avait si bien réussi avec Les Arnaqueurs et le film noir. Mais l’auteur de My beautiful laundrette se révèle bien moins à l’aise sur les terres de […]
Fidèle à sa nature revendiquée de faiseur au service des genres et des histoires qu’on lui propose, Stephen Frears essaie ici de renouveler avec le western l’opération qui avait si bien réussi avec Les Arnaqueurs et le film noir. Mais l’auteur de My beautiful laundrette se révèle bien moins à l’aise sur les terres de Ford que sur celles d’Hitchcock. Pourtant, il ne manque ici aucun des ingrédients traditionnels du western : un cowboy qui sait chiquer tout en roulant les mécaniques et les diphtongues à la texane (Woody Harrelson), un jeune pied-tendre au nom de guitariste rockab’ affublé du faciès de Richard Virenque (Billy Crudup), une femme fatale à la sensualité venimeuse (Patricia Arquette), une amitié virile et souterrainement homo comme chez Hawks, un propriétaire terrien pourri comme chez Ford, un vieux patriarche qui doit léguer son ranch comme chez Mann, des paysages de l’Ouest comme dans un Géo spécial USA, des cadrages en cinémaScope comme dans un rêve Marlboro Country, et même une intégration de la mort du genre, le film étant situé à l’ère de l’automobile débutante et du western finissant. Mais contrairement à ce qui faisait le succès des Arnaqueurs, Frears ne parvient jamais ici à se réapproprier le genre pour en livrer une lecture ou une critique au présent. Il se contente d’aligner très professionnellement de magnifiques chromos, d’illustrer consciencieusement une histoire déjà cent fois racontée, bref de faire un nouveau tour de piste avec le western qui tient plus du revival correctement exécuté que de la mélancolie crépusculaire à la Eastwood.
The Hi-lo country est au western ce qu’un groupe comme les Eagles fut à la country : une recréation climatisée, techniquement irréprochable, molletonnée et confortable, absolument lisse, dépourvue de toute aspérité. Bref, une de ces choses pas très intéressantes mais d’un indéniable confort de consommation (quoiqu’un peu anesthésiant), procurant le genre de plaisir facile et coupable que l’on s’autorise de temps à autre, quand on n’a rien de plus consistant à se mettre sous l’oeil. Frears ain’t no Clint, pour sûr, mais l’indulgence d’un jury bien disposé à l’approche de l’été lui épargnera le goudron et les plumes. Car malgré un scénario aussi prévisible qu’un discours d’Arlette Laguiller et des couchers de soleil écoeurants de facilité, l’Anglais nous a au sentiment, à notre nostalgie d’un genre disparu.