Suite et fin de la Mostra de Venise, avec un Mike Leigh et des cinéastes italiens en forme, des films américains et un palmarès foireux. Le palmarès de cette 56ème Mostra de Venise était à l’image de sa cérémonie de clôture : foireux. Ballet mal réglé des entrées et des sorties, coupure d’électricité, extraits calés […]
Suite et fin de la Mostra de Venise, avec un Mike Leigh et des cinéastes italiens en forme, des films américains et un palmarès foireux.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le palmarès de cette 56ème Mostra de Venise était à l’image de sa cérémonie de clôture : foireux. Ballet mal réglé des entrées et des sorties, coupure d’électricité, extraits calés en dépit du bon sens, toute la panoplie de ce que la presse italienne appelle « la malédiction de la remise des prix ». Seul Jerry Lewis (Lion d’or pour l’ensemble de son oeuvre) a su être égal à lui-même, le temps d’un petit sketch émouvant sur les images de son premier film, Le Dingue du palace (The Bellboy, 1960). En attribuant le Lion d’or à Zhang Yimou plutôt qu’à Abbas Kiarostämi, le jury a merdé grave. Pas plus fâché que ça, d’une philosophie toute persane, le bel Iranien aux lunettes fumées a fait tomber trois fois sa récompense aux pieds de la renversante Valeria Golino, avant de déclarer qu’il ne présenterait plus ses films en compétition dans aucun festival, n’ayant plus grand-chose à y démontrer ni à y gagner (sauf un Lion d’or ?). Après ce complet ratage, tout ce beau monde s’est dépêché d’aller bouffer, laissant Martin Scorsese regarder seul ou presque son « work in progress » consacré au cinéma italien, Il Dolce cinema. Toujours habile, le président Emir Kusturica a réussi à convaincre l’ensemble de nos confrères transalpins qu’il s’était battu comme un beau diable pour Kiarostämi, mais qu’il avait été mis en minorité par les sept autres membres du jury. Il semblerait plutôt que seuls Jean Douchet et le producteur japonais Shozo Ichiyama aient mouillé la chemise pour éviter un palmarès piteux à cette Mostra de transition. Peine perdue.
Ce qui n’aurait aucune importance si ce palmarès plat et convenu ne venait brouiller les pistes et masquer les efforts de renouveau entrepris par cette édition 99. Car les bonnes surprises n’ont pas manqué, même là où on les attendait le moins. C’est ainsi que les deux films italiens de la compétition ont séduit, l’un (Appassionate, Tonino De Bernardi) par sa façon théâtrale et enlevée d’inscrire les « histoires immortelles » colportées par les complaintes napolitaines dans les rues et les corps d’aujourd’hui ; l’autre (A Domani, Gianni Zanassi) par son sens des lieux et sa volonté délicatement affirmée de renouer sans vulgarité avec les histoires minuscules mais décisives des comédies « à l’italienne » d’autrefois. En s’attachant aux rêves naïfs d’un adolescent, puis à son errance en compagnie de sa grande soeur et d’une bande de mécaniciens automobiles sérieusement éméchés à travers les arcades de Bologne, Zanassi réussit un film modeste et juste, sans effets d’épate, faisant durer des situations subtilement oniriques jusqu’à leur point de rupture.
Nouvelle vénitienne encore plus étonnante, Mike Leigh livre un bon film, le premier depuis fort longtemps, avec Topsy-Turvy, consacré à la collaboration féconde mais conflictuelle des deux héros de l’opérette anglaise, Gilbert et Sullivan. Sur ce sujet a priori strictement insulaire et propice aux bâillements, Leigh offre une jolie méditation minnellienne (exactement comme Woody Allen avec son nouveau Sweet and Lowdown) sur la grandeur d’artistes mineurs qui excellent dans le trivial assumé tout en réjouissant les foules. Parfois très drôle, mené avec fougue par une troupe d’acteurs déchaînés, le film devient franchement extravagant par sa durée (2 h 40, opérettes japonisantes comprises) et sa propension à ne nous épargner aucun détail. C’est trop long, mais toujours passionnant, tant Leigh sait cultiver l’excès pour transformer une petite comédie en costumes en une épopée de culture populaire.
On n’en dira pas autant des films américains ou assimilés de Venise qui, à l’exception de l’aimable mais un peu court Being John Malkovich de Spike Jonze, brillaient tous par leur franche nullité, de l’insupportable mélo Miramax (The Cider house rules, Lasse Hallstrom) au cauchemardesque délire rétro d’Alison McLean (Jesus’son), en passant par la pénible lourdeur métaphorique d’une Jane Campion en toute petite forme (Holly smoke). Pour passer une agréable Mostra, mieux valait s’attacher aux pas de Zhang Yuan (17 ans, trop corseté mais d’une puissance indéniable) ou Bakhtiar Khudojnazarov (Luna Papa, presque trop grandiose). On en reparlera forcément.
{"type":"Banniere-Basse"}