Dans un court essai aussi drôle qu’intelligent, l’écrivaine interroge la place des personnages féminins dans la fiction.
Depuis Aristote, il est communément admis qu’une bonne histoire, “c’est l’histoire d’un homme qui fait des trucs – de préférence violents”, constate Alice Zeniter. L’autrice de L’Art de perdre (Flammarion, prix Goncourt des lycéens 2017) a décidé dans ce petit livre, très drôle, d’empoigner la question de la place des personnages féminins dans la littérature.
Sa démonstration menée tambour battant est érudite. La romancière manie avec dextérité les outils théoriques et décortique des exemples précis. Elle constate que nombre de romans sont centrés sur un garçon, les filles n’étant là que pour interagir avec lui et accessoirement lui servir de faire-valoir. Zeniter passe en revue et en vitesse les grandes étapes de l’histoire littéraire et interroge la place réservée aux autrices, exhortant à explorer leur travail.
Au-delà de la littérature, Zeniter analyse la mise en récit de la réalité. Autrement dit, notre représentation du monde : “J’ai appris à l’école que lors de la reproduction les spermatozoïdes, courageux et véloces, fonçaient pour féconder un énorme ovule immobile. Or, on sait désormais que l’ovule n’est pas seulement passif : il choisit et enlace le spermatozoïde qui va le féconder. Ce qu’on m’a enseigné est un récit de chasseur […], un énième récit de mec-qui-fait-des-trucs.”
Je suis une fille sans histoire (L’Arche/ »Des écrits pour la parole »), 112 p., 12 €