Un reporter photographe vedette (David Strathairn, le Harrison du titre) meurt en Bosnie en couvrant le conflit pour son news magazine. Persuadée qu’il n’est pas mort mais simplement disparu, son épouse (Andy McDowell) décide de partir à sa recherche. Elle largue enfants et confort pour débarquer dans le bourbier des Balkans, quasiment en escarpins. A […]
Un reporter photographe vedette (David Strathairn, le Harrison du titre) meurt en Bosnie en couvrant le conflit pour son news magazine. Persuadée qu’il n’est pas mort mais simplement disparu, son épouse (Andy McDowell) décide de partir à sa recherche. Elle largue enfants et confort pour débarquer dans le bourbier des Balkans, quasiment en escarpins. A travers ce personnage, Chouraqui représente l’homo americanus moyen vaguement ignorant à qui il se fait fort de montrer les cruelles réalités de la géopolitique contemporaine : conflit inter-ethniques, paysages dévastés, villes en ruines, populations civiles terrorisées, miliciens sans foi ni loi, chaos généralisé. Si Harrison’s flowers offre peu de surprises sur ce sujet, il est paré des qualités de fabrication propres à toute grosse production américaine : solidité des acteurs, densité des accessoires, décors, seconds rôles et figurants, bref, tout ce qui fait que ce qu’on voit sur l’écran existe. Les scènes de batailles et de guérilla urbaine sont particulièrement impressionantes d’efficacité et de crédibilité. Alors si l’histoire entre Harrison et sa femme est un McGuffin à l’eau de rose et plutôt improbable, le rendu de la guerre, la représentation du courage et des ambiguités du métier de reporter photo sont plutôt réussis (de ce point de vue-là, Hervé Chabalier de l’agence Capa adoube le film du sceau de l’authenticité).
Pourtant, une fois qu’on a dit ça, on est bien avancé. Harrison’s flowers, comme d’autres films de guerre, soulève pas mal de questions. Par exemple, n’a-t-on pas déjà vu ces images-là, en vrai, pendant des mois, dans les différents journaux et reportages télévisés ? Qu’est-ce qu’une fiction apporte de plus, hormis une couche supplémentaire de représentation tautologique ? Ce film, telle la proverbiale cavalerie, n’arrive-t-il pas trop tard, notamment par rapport au formidable Veillée d’armes de Marcel Ophuls ? Harrison’s flowers est une illustration réussie du conflit, mais seulement une illustration, qui n’apporte aucun élément de réflexion nouveau, que ce soit sur le plan historique, politique ou philosophique, et aucune forme cinématographique neuve. Par ailleurs, en prenant comme sujet les reporters de guerre, le film reste très occidentalocentriste et sa représentation des yougoslaves demeure limitée : à part une courte scène avec un étudiant, les locaux se réduisent à des soldats violents et violeurs ou à des grands-mères en fichu déchirées par la douleur, toujours au second plan du récit.
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