Le cinéaste Philippe Faucon, perdu de vue depuis quelques années, revient avec un harmonieux et sensuel portrait d’une adolescente marseillaise, Samia, à travers lequel il exprime, de l’intérieur, les dilemmes douloureux de la communauté maghrébine en France. Un tableau presque vériste de l’existence quotidienne d’une famille maghrébine de Marseille. Ni surplombant, ni politiquement correct, ni […]
Le cinéaste Philippe Faucon, perdu de vue depuis quelques années, revient avec un harmonieux et sensuel portrait d’une adolescente marseillaise, Samia, à travers lequel il exprime, de l’intérieur, les dilemmes douloureux de la communauté maghrébine en France. Un tableau presque vériste de l’existence quotidienne d’une famille maghrébine de Marseille. Ni surplombant, ni politiquement correct, ni misérabiliste, le cinéaste filme » à hauteur d’homme » comme on dit, ou plutôt à hauteur d’adolescente, puisque c’est avant tout le point de vue de Samia, 15-16 ans (lumineuse Lynda Benahouda) qui est privilégié au sein d’une fratrie nombreuse. A film, parfait, bref (1 h 17), histoire simple : alors que Amel (Nadia El Koutei), la sœur aînée de 19 ans, accède à un semblant d’indépendance, Samia est en butte à l’hostilité de son frère Yacine, macho traditionaliste (Mohamed Chaouch, impressionnant), véritable maton de cette famille claquemurée sur ses préceptes religieux et donc patriarcaux. Tous les éléments sont en place pour un mélo de gauche édifiant, mais Faucon n’appuie pas sur le champignon émotionnel. On n’est pas chez Yves Boisset. Chacun a ses raisons et ces raisons sont complexes. « Calme-toi et trouve ta place autrement« , dit sagement à Yacine un de ses frères qui a mis le doigt sur le malaise qui pousse le jeune homme à réprimer ses sœurs. Tout le film est ainsi, pesant le pour et le contre, nous montrant à la fois l’endroit et l’envers du décor, exposant indirectement l’ostracisme que subissent les maghrébins, mais aussi leur réactions rigoristes, leurs outrances déplacées, voire leur violence inacceptable envers les femmes. Mais ces petites tragédies intimes et quotidiennes sont largement contrebalancées par la sensualité du filmage et, bien sûr par celle des adolescentes elles-mêmes, filmées en liberté. On retrouve les corps épanouis de Samia et de ses copines se déhanchant lors d’un concert en plein air, ou passant une après-midi ensoleillée et heureuse ? mais très chaste ? avec des garçons à la plage. Grand moment de grâce : celui où la caméra chope quelques plans des visages heureux de Samia et son amie, en train de faire du roller.
Faucon respecte ces musulmans qui tentent de maintenir leur intégrité et leurs coutumes contre vents et marées. Il se garde bien de conclure, de statuer, ce qui serait faire de l’ingérence morale. Il n’impose pas son point de vue d’Européen » évolué » (= post-colonialiste) mais se contente de laisser le film ouvert : la mer , le soleil, le retour au bled en bateau pour les vacances’ Tout est toujours possible.
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