Dans Papa Was Not a Rolling Stone, elle prête ses traits à Sylvie Ohayon, auteure de l’autobiographie éponyme qu’elle a elle-même adaptée au cinéma. Rencontre avec Doria Achour, actrice de 23 ans à la tête bien faite.
Long-métrage autobiographique, Papa Was Not a Rolling Stone marque le passage derrière la caméra de Sylvie Ohayon, auteure à succès qui signait en 2011 un roman éponyme récompensé par le Prix de la Closerie des Lilas. Ohayon, ancienne publicitaire à qui l’on doit des slogans aussi célèbres que “Faire du ciel le plus bel endroit de la terre” (Air France) ou “Regardez-moi dans les yeux… J’ai dit les yeux” (Wonderbra), livre ici un premier film attachant, dont l’énergie témoigne d’une envie intacte d’en découdre. Épaulée par la réalisatrice Sylvie Verheyde, elle met en scène la fin de son adolescence dans la Cité des 4000 à La Courneuve, où elle a grandi sous les coups d’un beau-père violent (interprété par Marc Lavoine) et sans l’appui d’une mère complètement larguée (Aure Atika).
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Dans une volonté acharnée d’éviter le pathos -au point qu’une respiration fait parfois défaut entre deux déferlements de vannes-, l’histoire de Sylvie Ohayon, rebaptisée Stéphanie dans le film, est traitée sur le ton de la comédie et menée tambour battant par Doria Achour (aucun rapport avec Mouloud). L’actrice de 23 ans, révélée précédemment dans La Fille publique de Cheyenne Carron, s’est nourrie de l’impressionnante force vitale de ce personnage pour l’incarner avec une fraîcheur sidérante. À Paris, on a rencontré cette jeune femme intello, belle et avenante, qui poursuit des études de cinéma en parallèle de sa carrière naissante d’actrice, mais aussi de réalisatrice (elle a réalisé un court-métrage sur le Printemps arabe). Pour faire plus ample connaissance, on l’a soumise à une interview “Autobiographie”.
Après La Fille publique, c’est la deuxième fois que tu joues dans un film autobiographique: un hasard?
Pas complètement, car Sylvie Ohayon m’a choisie pour ce rôle en voyant le film de Cheyenne Carron. Elle s’est peut-être projetée plus facilement parce que j’avais déjà eu ce type de rôle. Mais ce n’est pas la seule raison. D’abord, on partage les mêmes origines tunisiennes: pour ma part, c’est du côté de mon père. Mais Sylvie et moi avons aussi en commun le goût de la littérature: après le bac, j’ai fait hypokhâgne et khâgne puis une licence de lettres, et elle a tout fait pour pouvoir étudier à la Sorbonne. Je me suis d’ailleurs reconnue en elle dans le fait qu’elle veuille s’en sortir par les études. J’ai toujours voulu les poursuivre, même quand je jouais ou que je réalisais.
“Comme toutes les jeunes filles, j’ai fait beaucoup de bêtises.”
Si tu devais écrire ton autobiographie, où commencerait-elle?
À mes premiers souvenirs, vers trois ou quatre ans, quand j’ai déménagé de Grenoble à Paris avec mes parents, mon père étant metteur en scène de théâtre, ma mère dramaturge. Je me souviens de cette période par bribes: je les suivais sur toutes leurs répétitions, toutes leurs pièces et tous leurs festivals, j’allais très peu à l’école. C’est une période qui m’a marquée, même si je ne fais pas du tout de théâtre et que je me sens assez loin de ce milieu-là.
Jusqu’ici, quel serait le climax de ton autobiographie?
Tout dépend sur quoi je choisirais de la centrer, mais je pense que, comme dans le film, ce serait aussi l’année du bac. C’est une période qui a été très importante pour moi et qui l’est pour tout le monde, car elle marque une sorte de tournant dans la vie. On quitte le monde de l’adolescence et on devient adulte. Retrouver ces sensations-là pour le rôle n’a pas été forcément évident car je me sens très différente de moi à 18 ans, mais l’écriture de Sylvie Ohayon est tellement vraie et spontanée que j’ai pu m’appuyer dessus pour construire mon personnage.
Dans ton autobiographie, quel épisode préférerais-tu passer sous silence?
Comme toutes les jeunes filles, j’ai fait beaucoup de bêtises. J’avais une meilleure amie avec qui on faisait plein de conneries. Je n’en dirai pas plus. (Rires.)
Quel chapitre de ton autobiographie aimerais-tu écrire rapidement?
Je ne suis pas très pressée. Je ne me projette pas beaucoup et je n’aimerais pas spécialement voir ce qu’il va se passer dans deux dans. Je laisse les choses venir. Mais, allez, si je devais faire un bond dans le temps, j’irais tout de suite à la case “premier long-métrage” en tant que réalisatrice.
“Je suis une grande fan de Tarkovski et de Bergman, je suis un peu chiante.”
Quel serait le titre de ton autobiographie?
In The Mood For Life. (Rires.)
Qui en réaliserait l’adaptation au cinéma?
Gaspar Noé. Je l’aime beaucoup mais surtout, je serais curieuse de voir ce qu’il en ferait. Sinon, je suis une grande fan de Tarkovski et de Bergman, je suis un peu chiante. (Rires.) Et dans les contemporains, Alejandro Gonzalez Iñárritu et Terrence Malick, même si j’ai quelques réserves sur son dernier film (Ndlr: À La Merveille).
Qui jouerait Doria Achour?
En tout cas, pas moi. Et je pense que ce ne serait pas non plus une actrice connue. Il faudrait lancer un grand casting sauvage dans toute la France. Pour les qualités requises, disons qu’elle devrait être indisciplinée… Sauf avec moi.
Je te rappelle que ce n’est pas toi qui réalises, mais Gaspar Noé…
Ah! Alors disons que c’est moi en fait, je préfère!
“Avec Aure Atika, quand on s’est croisées pour la première fois, on a trouvé qu’on se ressemblait vraiment.”
Dans Papa Was Not a Rolling Stone, ta mère est incarnée par Aure Atika et ton beau-père par Marc Lavoine. Dans ton film autobiographique, qui incarnerait tes parents?
Eux-mêmes! Avec Aure Atika, quand on s’est croisées pour la première fois, on a trouvé qu’on se ressemblait vraiment. En voyant la séquence où on se regarde toutes les deux dans le miroir, tout le monde m’a dit qu’on pourrait être mère et fille. C’était super de tourner avec elle, j’aurais aimé qu’on ait encore plus de scènes ensemble. Quant à Marc Lavoine, dès que Sylvie disait “Coupez!”, il me demandait s’il ne m’avait pas fait mal. Il était un peu mal à l’aise d’avoir à me frapper. C’était mignon. (Sourire.)
Pour Papa Was Not A Rolling Stone, Jean-Jacques Goldman a enregistré une version acoustique du titre Envole-moi. Quelle serait la BO de ton film autobiographique?
Je ne sais pas si c’est honteux ou pas, mais quand j’étais ado, j’étais fan de Ben Harper. J’étais même amoureuse de lui. Il y aurait aussi Nirvana, Jimi Hendrix… Plutôt du rock. Aujourd’hui, j’écoute des choses très différentes. J’aime beaucoup le rap français -NTM, IAM, Rocé, Oxmo Puccino-, et le jazz aussi.
Papa Was Not a Rolling Stone est dédié aux Courneuviens et aux enfants de la République. A qui dédierais-tu ton film autobiographique?
Sans doute à ma grand-mère, qui a été très patiente avec moi pendant toute mon adolescence. Elle m’a toujours soutenue et encouragée.
Propos recueillis par Faustine Kopiejwski
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