Au-delà des annonces de la potentielle fin de l’Internet illimité, c’est la neutralité du net qui est en danger.
Inquiétudes la semaine dernière après la publication par Owni d’un article titré « La fin de l’internet illimité ». Il présentait un document de travail de la Fédération française des télécoms (FFT)(qui comprend entre autres Orange, SFR, Bouygues) sur la « transparence de l’information consommateur ». Ce document évoquait notamment des exemples d’offres pour l’internet fixe, comme des forfaits plafonnés à un certain seuil de consommation ou n’intégrant pas automatiquement la VoIP (type Skype). Les exemples n’étaient que théoriques mais le porte-parole d’Orange, Jean-Marie Culpin, a néanmoins confirmé à Owni qu' »il y a certains forfaits sur lesquels on risque de mettre des seuils ».
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Devant cette éventualité, qui instaurerait donc des forfaits à plusieurs vitesses (les non plafonnés plus chers, les plafonnés moins chers), et constituerait une véritable attaque contre la neutralité du net, le monde des télécoms et même le ministre de l’Industrie ont vite réagi. Pour Eric Besson, « le gouvernement n’envisage aucune restriction de l’accès à internet et travaille bien au contraire au développement du très haut débit fixe et mobile sur l’ensemble du territoire et pour l’ensemble des Français ».
Le directeur général de la FFT a déclaré à l’AFP qu' » il n’est pas question de la fin de l’internet illimité sur [les lignes] fixes », tout en nuançant dans Le Parisien, évoquant « des offres avec des tarifs plus élevés que ce qu’on voit aujourd’hui pour ceux qu’on appelle les « net-goinfres », soit les gros consommateurs en bande passante. Orange, Free, Numéricable, Bouygues et SFR ont tous annoncé pour leur part qu’ils n’avaient aucune intention d’abandonner l’internet illimité.
Déjà des restrictions sur l’Internet mobile
Même si, pour l’instant, on en reste là, ce coup de tonnerre aura marqué les esprits, faisant prendre conscience de l’importance de sauvegarder un internet sans discrimination. Car malgré les efforts des associations de consommateurs ou de défense d’internet pour alerter sur les atteintes possibles à la neutralité du net, celle-ci est loin d’être pérenne. On sait déjà qu’elle n’est pas respectée sur l’internet mobile, avec des débits réduits ou bloqués au-delà d’une certaine consommation et des restrictions sur la VoIP et le P2P.
Pas plus loin que début juillet, les dirigeants de Vivendi, Deutsche Telekom et Alcatel-Lucent faisaient des propositions à Neelie Kroes, commissaire européenne en charge des questions numériques, pour le développement de l’internet (fixe) à haut débit. Parmi celles-ci, il était suggéré que l’Europe encourage « la différenciation en matière de gestion du trafic », soit laisser la possibilité de créer des offres identiques à celles évoquées dans le document de la FFT. Une autre proposition ouvre la voie à de nouveaux modèles économiques où les acteurs du net paieraient les fournisseurs d’accès pour voir leurs contenus mieux diffusés. On s’éloignerait ainsi de plus en plus d’un internet libre et égalitaire.
Une proposition de loi PS sur la neutralité du net a été rejetée en mars dernier par les députés. Inscrite dans le projet du PS pour 2012, la neutralité du net va devenir aussi un enjeu politique.
Anne-Claire Norot
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