“Ivre, il tente d’étrangler sa compagne pour des grumeaux dans la pâte à crêpes”, c’est de cette façon que les journalistes du site d’Europe 1 ont décidé de titrer un article de leur rubrique “Faits divers” le 22 septembre dernier. En illustration: une photo de crêpe en train de cuire. Pourquoi c’est dérangeant? Parce qu’en voulant faire de l’humour et du clic, en empruntant une formule de la page Facebook Ivre et avec un titre digne du Gorafi, Europe 1 minimise les violences faites aux femmes.
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Rappelons tout de même qu’en France, selon le ministère de l’Intérieur, une femme meurt sous les coups de son conjoint tous les 3 jours. Notons aussi que ces chiffres sont en augmentation de 9% par rapport à 2015. En détournant l’attention des lecteurs de la problématique centrale: celle de la violence faite aux femmes au sein de certains couples, Europe 1 oublie le poids qu’ont les mots dans de telles circonstances.
D’autres médias se sont récemment fait épingler par les internautes pour leur difficulté à clairement évoquer les violences au sein du couple et les féminicides. On pense par exemple à cet article de Ouest-France titré ainsi: “Carentan. Un drame conjugal fait deux morts”, habilement corrigé par Stéphanie Lamy sur Twitter: “Carentan. Un homme tue sa femme puis se suicide.”
Titre corrigé @OuestFrance50 @OuestFrance Meurtrier n’est pas une victime. Cessez de minimiser #violencesmachistes #LesMotsTuent #Féminicide pic.twitter.com/0WL4207k3C
— Stephanie Lamy (@WCM_JustSocial) 28 juillet 2017
En juillet dernier, L’Express a mis en lumière le processus par lequel un féminicide peut être “glamourisé” pour devenir un crime passionnel. Le magazine a décrypté un article sur Bertrand Cantat titré Tuer passionnément dans le hors-série de Gala consacré aux “stars à la barre”. Sophie Gourion, auteure d’un blog sur le traitement de ces violences par les médias, réagissait: “Ça romantise le meurtre, ça l’édulcore. On est dans un cas de violences conjugales, de féminicide. Là, avec ce titre, on a juste l’impression d’être dans le cas d’un amoureux mû par une passion destructrice, comme dans une pièce de théâtre.”
Ce serait bien Maitre @EmmanuelPierrat responsable de ce titre vomitif « tuer passionnément » #Cantat #féminicide @galafr #LesMotsTuent pic.twitter.com/sTVVmihivj
— Stephanie Lamy (@WCM_JustSocial) 4 juillet 2017
Avec son titre cynique et racoleur, cet article d’Europe 1 contribue à cette théâtralisation des violences faites aux femmes et à leur banalisation, sous couvert d’un bon mot particulièrement malvenu.
Margot Cherrid
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