En créant Frichti, Julia Bijaoui a réussi à concilier sa passion de la food et sa soif d’entreprendre. Rencontre.
En lançant Frichti, start-up de livraison de repas frais, Julia Bijaoui n’imaginait pas qu’elle serait aujourd’hui à la tête d’une entreprise qui emploie 300 personnes. C’est pourtant le tour de force que cette Parisienne de 28 ans a accompli en à peine un an et demi, avec la complicité de Quentin Vacher, son associé et compagnon, rencontré alors qu’elle était stagiaire chez Birchbox. Elle passe finalement trois ans chez le numéro un de la box beauté avant de partir travailler au lancement d’un café sur la Seine en 2014. Elle quitte finalement le navire au bout de six mois, frustrée par la lenteur des projets offline. C’est à ce moment-là que le couple, qui se retrouve chaque soir épuisé et affamé, déplore l’absence d’un service de livraison de plats faits maison, frais et abordables. Ensemble, mus par la volonté “d’amener du bon dans les villes”, ils montent Frichti en juin 2015. Julia Bijaoui, qui a reçu l’amour du bien-manger en héritage de ses origines méditerranéennes, réalise alors son rêve de travailler autour de la bonne cuisine.
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“Les femmes doivent croire en elles, faire taire la petite voix qui les fait douter et oser!”
Deux levées de fonds et un bébé plus tard, Julia Bijaoui ne relâche pas la pression et ambitionne même d’implanter Frichti dans d’autres grandes villes françaises que Paris, et pourquoi pas dans une capitale européenne. Elle tient cette envie d’avancer de ses parents, entrepreneurs passionnés, qui lui ont “montré l’exemple d’un véritable philosophie d’entreprendre” et puise son énergie dans la conviction de “pouvoir changer les choses et mettre en œuvre une mission qui a du sens”.
Cette vision inspirante de l’entrepreneuriat l’a menée en tête du palmarès des 10 femmes à suivre établi en janvier 2017 par StartHer, une association qui donne de la visibilité et suscite des vocations tech et entrepreneuriales chez les femmes. Ravie de partager son expérience, Julia en profite pour encourager les femmes “à croire en elles, faire taire la petite voix qui les fait douter et oser!”. En effet, selon elle, c’est le manque de confiance en elles qui freine les femmes et les retient de se lancer. De bons conseils dispensés par cette accro au boulot qui s’est prêtée à notre interview Workaholic.
À quand remontent les premiers symptômes de ton workaholisme?
À ma prépa HEC: deux ans de travail intense, jour et nuit, soir et week-end. J’ai adoré! C’est très enrichissant, et cela m’a donné le goût du travail extrême.
La fois où tu as frôlé le burn out?
L’aventure Frichti est très prenante, avec des moments plus difficiles que d’autres, mais pour l’instant pas de burn out! Et ma fille est une véritable respiration.
En quoi travailler est-il grisant?
J’aime être maîtresse de mon propre destin, œuvrer pour un projet qui a du sens pour moi. C’est ce pour quoi je me lève le matin, c’est ce qui me fait avancer.
Ton truc pour avoir de l’endurance?
Bien manger! (Rires.) Au-delà de la qualité des produits, c’est la convivialité de se retrouver à table autour d’un bon repas. Assise, avec des assiettes et des couverts. C’est pour cela que nous avons lancé Frichti: avec mon compagnon et associé, on rentrait épuisés du bureau, frustrés de ne pas avoir le temps et l’énergie de se faire un bon petit plat. On a donc imaginé une alternative pour bien manger même quand on est débordé!
Quels sont les effets secondaires désagréables?
Quand on est entrepreneure, on est très vite absorbée par son activité, et la vie sociale en prend un coup. Comme je travaille avec mon compagnon, notre couple a tendance à former une bulle où l’on ne pense qu’au travail… Il est nécessaire d’en sortir et de rester connectée avec son entourage.
La dernière fois que tu as fait une nuit blanche?
Depuis que j’ai accouché il y a un mois et demi, c’est tous les jours, mais ce n’est pas vraiment à cause du boulot! Sinon, je me souviens que pour la dernière levée de fonds (Ndlr: 12 millions d’euros en mars 2016 via les fonds Idinvest et Alven Capital, mais également via les business angels Céline Lazorthes, Pierre Valade et Céline Orjubin), on a passé des nuits à préparer notre dossier pour les investisseurs.
Ton anti-stress le plus efficace?
Voir la mer! Quitter Paris, me ressourcer auprès de la nature. Cela me permet de prendre du recul, et j’en ressors rassérénée.
Ta façon d’appréhender la detox?
Je ne fais pas vraiment de pause car l’entreprise est encore jeune. C’est mon choix, et j’aime me sentir responsable. Mais, même s’il est difficile de penser à autre chose, je ne souhaite pas devenir l’esclave de mon projet.
À long terme, envisages-tu de décrocher?
Ce n’est pas vraiment au programme. Mais à terme, il n’est pas possible de ne vivre que pour son entreprise 24/24h, ce n’est pas l’hygiène de vie que je me souhaite.
Qu’est-ce qui te ferait arrêter?
Quand je ne saurais plus pourquoi je me lève le matin. Si je sentais que ça ne marche pas, ou que je ne suis pas en accord avec la mission, je ne m’obstinerais pas. Car dans ces cas-là, on fait des compromis et le projet finit par ne plus nous ressembler. Là, j’arrêterais.
Propos recueillis par Adeline Anfray
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