On a lu pour vous cet article sur le discours de la réalisatrice Houda Benyamina à Cannes et on vous le conseille.
“Comme tous les ans, comme à peu près tout le monde –même ceux qui n’en ont cure– j’ai regardé la cérémonie de clôture du 69ème Festival de Cannes. Et parce que c’est Cannes, parce que le cinéma est bien le seul domaine où la mondialisation est synonyme de cosmopolitisme, d’ouvertures, de tabous mis en lumière, d’interdits transgressés, de visages inédits, de corps dévoilés, de provocations salutaires bref parce que malgré le consumérisme, L’Oréal, la hiérarchie insupportable, le dernier opus inutile de, l’hystérie collective, l’artifice, Cannes est le festival qui prend le mieux la lumière et que toutes les nationalités, toutes les origines et tous les sexes y sont présents et bien oui, Cannes fait sens […]. Il y a eu deux cris extraordinaires lors de cette cérémonie de clôture. Et ce n’étaient ni les larmes délirantes de Xavier Dolan qui, malgré tout son talent de cinéaste, ne parvient jamais à me faire croire à l’authenticité de son personnage, ni les discours larmoyants et surréalistes des iraniens primés qui, en appelant à Dieu, à la Nation, au peuple, bref, à tout ce sombre bagage religieux et nationaliste, m’ont juste fait penser que les mollahs les attendaient sévère à leur retour s’il leur prenait l’envie de faire la bise aux uns et aux autres […]. Non, ce qui m’a volé un grand sourire et quelques larmes […], ce qui m’a fait me dire qu’il y avait encore de l’espoir à la louche et des rêves à dormir debout, ce sont Ibrahim Maalouf et Houda Benyamina […].
Elle a gueulé Houda, elle a été vulgaire, grossière, elle a monopolisé le temps, elle a crié sa victoire, elle a remercié tous ceux qui ont pu permettre ça, ce prix à elle qui ‘n’en avait rien à foutre de Cannes’. Ce qu’elle voulait, c’était mener son film jusqu’au bout, faire éclater sa voix, faire la nique à ceux qui croyaient la chose impossible. Parce qu’elle est une femme avant tout. Et une femme franco-marocaine. Elle a gueulé Houda, elle a gueulé pour nous, les femmes, pour qu’on soit plus nombreuses à tous les niveaux, pour qu’on prenne le pouvoir. Si elle y était parvenue, toutes pouvaient y parvenir. Elle a gueulé que Cannes était à ‘nous’. Et dans ce ‘nous’ il y avait autant de femmes que de métèques. Houda m’a fait du bien. Houda aurait dû faire du bien à tout le monde, surtout au monde du sexe féminin. Parce qu’avant tout, elle a accompli cette chose si difficile pour les femmes: elle a pris la parole. Et elle n’en avait rien à foutre du temps que prendrait son cri, elle l’a pris ce temps.”
Dans une tribune intitulée Eloge de la vulgarité à Cannes (et donc ailleurs), l’écrivaine Abnousse Shalmani explique pourquoi le discours de la réalisatrice Houda Benyamina, récompensée de la Caméra d’or pour son premier long-métrage Divines, était primordial.
A lire le plus vite possible sur le site de Vanity Fair.