La Sine Qua Non Run est une course mixte qui vise à lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Explications avec Mathilde Castres, à l’origine de l’initiative.
“Courez pour l’égalité”. C’est le slogan de la course Sine Qua Non Run, portée par l’association Tu Vis! Tu Dis!, qui aura lieu le 19 octobre prochain au Parc de la Villette. Au programme: un village et des animations pour sensibiliser petit·e·s et grand·e·s à la question de la mixité dans le sport et du harcèlement mais aussi, et surtout, une course (mixte) pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Objectif: encourager les femmes, qu’elles soient sportives ou non, à prendre leur place dans l’espace public et récolter des fonds pour trois associations (La Maison des Femmes, Fight For Dignity et Parler) qui accompagnent au quotidien celles qui sont victimes de violences sexuelles.
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Entre les remarques sur la tenue et les commentaires déplacés en plein entraînement, il faut parfois du courage pour chausser ses baskets.
Lancée l’année dernière, la course Sine Qua Non Run est une réponse symbolique adressée aux agressions quotidiennes que peuvent subir les femmes dans l’espace public. Le phénomène est loin d’être isolé puisque selon une étude de l’Ifop menée en avril 2018, huit Françaises sur dix (81%) ont déjà été confrontées à au moins une forme d’atteinte ou d’agression sexuelle dans la rue ou les transports en commun. Et les sportives ne sont évidemment pas épargnées: entre les remarques sur la tenue et les commentaires déplacés en plein entraînement, il faut parfois du courage pour chausser ses baskets. Face à ce constat, Mathilde Castres, présidente de Tu Vis! Tu Dis!, raconte que l’idée d’organiser une course a germé dans l’esprit de l’association un an avant l’affaire Weinstein et l’apparition du mouvement #MeToo. Le projet a “tout de suite été soutenu par la Mairie de Paris”, souligne-t-elle. “L’affaire Weinstein a ensuite éclaté et nous a donné plus d’écho”. La présidente de l’association constate depuis un réel changement et notamment “une volonté de la part des entreprises, comme des particuliers et des institutionnels de faire sortir le sujet des violences sexistes et sexuelles”.
Un événement chargé en symboliques
Plutôt que d’organiser un colloque, un Grenelle, une exposition ou une manifestation, Mathilde Castres a préféré parier sur un grand événement sportif afin d’y “embarquer l’ensemble de la société civile, toutes les classes d’âge ainsi que toutes les tranches de professions”, explique-t-elle. “Dans un événement sportif, il y a un engouement qui se dégage. La course est un sport accessible à tout le monde, où chacun peut se lancer un défi”, détaille celle qui aime également jouer sur les symboles. “On a un point de départ commun, la société actuelle, et on va, ensemble, courir vers un point d’arrivée, c’est-à-dire vers une société plus égalitaire.” Si le départ est prévu à la tombée de la nuit (18h pour la course de 6 km et 19h pour celle de 10 km), ce n’est pas non plus le fruit du hasard. “La nuit est le moment où, en tant que femme, on se sent le plus menacée. De même, on a choisi la Villette parce que c’est un parc très agréable en journée mais peu fréquenté en soirée”.
“S’il fait chaud, on doit pouvoir courir en brassière sans que cela soit un sujet!”
Car Mathilde Castres souhaite, en plus de récolter des fonds pour des associations, redonner du pouvoir à ces femmes qui “se posent la question de leur tenue avant d’aller courir, se font emmerder dans la rue alors qu’elles préparent le marathon, doivent revoir leur parcours. Certaines même s’interdisent de courir passé une certaine heure”. Depuis la première édition de la course l’année dernière, les témoignages se multiplient à ce sujet, rapporte Mathilde Castres. Alors pour aider ces femmes plus d’une fois par an, l’association a décidé d’organiser des courses appelées “Sine Qua Non Squad”. “Chaque mois, on cherche un endroit où l’on ne peut pas aller et on s’y rend, ensemble, entre femmes. L’idée n’est pas de stigmatiser les lieux mais de travailler main dans la main avec les collectivités locales”. Le Squad s’est donc déjà rendu à Aubervilliers, Pantin, dans le quartier de Stalingrad à Paris mais aussi en pleine forêt et sur les quais de Seine dans la capitale, lors des beaux jours cet été. “S’il fait chaud, on doit pouvoir courir en brassière sans que cela soit un sujet!”, s’exclame Mathilde Castres, déterminée à faire du sport “un moyen de favoriser l’empowerment féminin”. Vous n’avez plus qu’à chausser vos baskets.
Arièle Bonte
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