On a posé 5 questions à Camille Aumont Carnel, 22 ans, qui a créé le compte Instagram Je m’en bats le clito pour aller à l’encontre des idées reçues sur la sexualité féminine.
“Abattre les tabous autour des femmes de façon cash, sans filtre et décomplexée avec bien entendu une petite touche d’humour”, c’est le pari de Camille Aumont Carnel, 22 ans, qui est à l’origine du compte Instagram intitulé Je m’en bats le clito et suivi par plus de 120 000 abonné·e·s. Cette jeune diplômée de l’école de cuisine Ferrandi en avait “ras le bol”: “Je me suis rendu compte en écoutant une conversation d’amis masculins, qu’ils étaient complètement à côté de la plaque en ce qui nous concerne. Je me suis dit: ‘Ils ont 25 ans et sont persuadés de choses absolument fausses’.” La vingtenaire décide alors de créer sa page en octobre dernier, pour que des sujets comme le plaisir féminin soient abordés librement. On lui a posé quelques questions.
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Je m’en bats le clito, c’est quoi?
C’est un compte Instagram où j’aborde tous les thèmes liés aux femmes: leur quotidien, leurs envies, leurs désirs, leurs plaisirs ou encore leurs complexes. 95% des posts viennent de moi et 5% sont des témoignages ou des idées de ma communauté. J’adorerais qu’il y ait plus de suggestions pour que ce compte devienne notre page à toutes. C’est aussi un état d’esprit, une façon de dire “Assume-toi, sois fière de la personne que tu es, sois fière d’être une femme”. Comme on peut le deviner, l’expression “Je m’en bats le clito” vient de “Je m’en bats les couilles”, cette phrase qu’on utilise toutes et tous, et j’insiste sur le toutes. J’ai remarqué que, lorsqu’on dit “Je m’en bats les couilles”, ça ne choque personne, en revanche “Je m’en bats le clito”, ça fait réagir. Ca va du dégoût à la surprise, mais ça provoque toujours une réaction.
Camille, créatrice du compte Je m’en bats le clito, DR
Selon toi, Instagram favorise-t-il la sororité et donc le partage d’expériences?
Je dirais que ça favorise le partage tout court. C’est un format qui se prête particulièrement bien à ce genre de combat (Ndlr: le féminisme, la libération de la parole des femmes). Je pense que le boum est en train de se faire sur Instagram. Et oui, bien sûr, ça favorise aussi la sororité. Il y a beaucoup de bienveillance et une ambiance très famille, très communautaire sur ce réseau social.
Penses-tu qu’on tend vers la libération du clito, et par conséquent celle du plaisir féminin?
Carrément, à 150%! Notre génération a envie de changer les choses à ce sujet. On n’a plus envie de se taire et on en a marre d’avoir honte de choses absolument naturelles. Il y a clairement une libération de la parole des femmes au niveau de leur plaisir, de leur sexualité et donc au niveau de leur clito. Comme on dit, l’année 2019 sera l’année de la meuf!
“Depuis que j’ai créé ce compte, on parle beaucoup plus de masturbation avec mes amies. On se partage même des astuces!”
Selon toi, que faudrait-il faire de plus pour rendre le clitoris et le plaisir féminin moins tabous?
Je pense que c’est surtout une question d’éducation. J’entends et je vois bien que ce n’est pas facile d’en parler pour tout le monde. Mais je sais que les personnes de ma communauté, le jour où elles auront des enfants, ne garderont pas le silence parce qu’on a souffert de ce tabou autour du plaisir féminin. C’est aussi de notre responsabilité d’en parler. À un moment, il faut avoir du clito, il faut oser aborder ces sujets. On a toutes des super copines avec lesquelles on partage tout mais on est incapable de se dire si on se masturbe et si oui, quand? Comment? Il y a vraiment un non-dit autour de tout ça. Depuis que j’ai créé ce compte, on en parle beaucoup plus avec mes amies. On se partage même des astuces de masturbation, c’est un délire!
Quel constat as-tu fait à partir de tous les messages que tu as reçus?
Depuis la création du compte, je reçois beaucoup de remerciements. C’est assez fort parce qu’il y a des femmes qui sont persuadées qu’elles ont un problème. Certaines m’ont dit: “Merci de m’avoir aidée à réaliser que je ne suis pas bizarre, on est toutes pareilles, c’est juste qu’on n’en parlait pas.” De plus en plus d’hommes m’écrivent. Ils me disent à quel point ce compte leur fait du bien à eux aussi et qu’ils trouvent des réponses à leurs questions. J’ai aussi des mères qui me disent que, grâce à ce compte, elles savent comment aborder la sexualité avec leurs enfants donc cette page a aussi un côté éducatif. Je suis super contente de voir cette diversité de profils. Je ne voulais pas que Je m’en bats le clito s’inscrive dans la case du compte féministe, par les femmes et pour les femmes. C’est en impliquant tout le monde qu’on avance.
Propos recueillis par Wendy Le Neillon
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