REPRISE. Une fable sur la folie des grandeurs, où l’art de mener un récit, de camper des personnages, prend le dessus sur l’action.
Sous l’œil de Huston, le narrateur de l’histoire n’est autre que son auteur, Kipling, qui accouche indirectement de ses personnages dans l’obscurité d’un bureau. Une légère brise soulève les feuilles posées à côté de lui et apparaît Peachy, survivant du récit à venir, sorte d’émanation mentale et de relais entre celui qui écrit des histoires et celui qui s’en raconte, alias Daniel son compagnon de route, celui qui voulut être roi.
La marque de Kipling est d’autant plus lisible que sa jubilation créatrice vibre de toute sa vivacité dans de nombreux clins d’œil à l’histoire en train de se faire. Plane en permanence une distanciation amusée due à l’humour des dialogues et à l’interprétation de Sean Connery et Michael Caine duo qui s’impose avec évidence alors qu’ils furent des choix de dernier recours, suite aux morts de Walter Huston, Clark Gable, Humphrey Bogart et au refus de Paul Newman. Si la mise en scène reste plutôt classique en terme d’action, elle sait cerner chaque élément pouvant servir de tremplin à la fiction racontée et trouve dans ses choix de teintes la tonalité toute ambiguë de cette avidité destructrice : la lumière dorée qui illumine le film est aussi bien le reflet du trésor touché de près que le signe d’un aveuglement, tout comme le rouge que portent Peachy et Daniel est à la fois la couleur de leur triomphe (ils dirigent les populations conquises, vêtus de leur uniforme rouge de soldat anglais) et de leur perte (le sang qui coule sur la joue de Daniel est bien la preuve qu’il n’est pas un dieu).
A voir ou revoir pour goûter un vrai plaisir de fiction.
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