Nous avons imaginé six œuvres raisonnablement fantasques qu’on commande au père Noël pour la décennie à venir.
Misterioso : Un biopic de Thelonious Monk par les frères Safdie
Financièrement sécurisés par le succès d’Uncut Gems, les Safdie se risquent à la reconstitution historique avec un resplendissant Brooklyn fifties inspiré du Inside Llewyn Davis des frères Coen. Monk, dont le Pannonica fermait déjà leur tout premier film, The Pleasure of Being Robbed, ne connaît pas encore le succès dans la période choisie (1952) : interdit de club depuis une arrestation pour possession de drogue, il officie pour quelques dollars dans les petits dancings de Brooklyn – mais aussi les bar-mitzvah – pour subvenir aux besoins de ses deux enfants pendant que ses amis du bebop triomphent, souvent en jouant ses propres compositions. Acteur principal : Hannibal Buress.
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A Constelação de Golfinhos : Un film dans l’espace de Kléber Mendonça FIlho
L’auteur de Bacurau imagine dans un huis-clos de boîte de conserve la perdition d’un équipage d’apatrides spatiaux pourchassé par les polices interstellaires et cherchant une planète hospitalière où atterrir. À la croisée de ses influences Carpenter (dont le premier film, Dark Star, racontait l’errance d’un équipage de pirates spatiaux devenus fous) et d’un sous-texte migratoire qui fait de l’espace une nouvelle Méditerranée (Aquarius est à la fois le nom de son second film et du navire humanitaire qui inspire le vaisseau de celui-ci), le film marque la troisième collaboration du cinéaste avec l’actrice Sônia Braga, commandante affublée d’un cache œil à la Albator.
Run The World : Un James Bond féminin
Respectant la règle obligeant symboliquement la franchise à réserver le rôle aux Britanniques, à tout le moins aux membres du Commonwealth, la productrice Barbara Broccoli offre la succession de Daniel Craig à l’anglaise Vanessa Kirby, rompue tant à l’exercice du film d’action qu’à celui des courbettes british, puisqu’elle a autant été révélée par la franchise Mission : Impossible que par la série The Crown. Sur un scénario de Phoebe Waller-Bridge, avec une chanson originale de Jorja Smith, Jane Bond renouvelle le personnage en conservant ses deux attraits principaux : ses talents d’espionnage et son pouvoir de séduction, avec l’irruption d’une nouvelle lignée de “Bond boys” mais aussi, tout de même, la subsistance de quelques Bond girls.
Zoé : Une comédie américaine de Justine Triet
Notoirement inspirée par Blake Edwards, Billy Wilder ou Woody Allen, la réalisatrice de Victoria et Sibyl se mesure à ses maîtres en partant à la conquête de la comédie new-yorkaise, dans un nouveau portrait de femme en perte de contrôle qui troque l’archétype de la psy pour un autre genre d’analyste : une journaliste approchant des 40 ans, prise dans un tourment à la fois amoureux et professionnel lointainement inspiré de La Dame du Vendredi. La réalisatrice reprend les grandes lignes du film de presse de Howard Hawks qu’elle met au diapason des médias des années 20 – avec des polémistes de plateau télé, de la cancel culture, des influenceurs en pagaille. Autour d’une Greta Gerwig revenue exceptionnellement devant la caméra, un casting transnational et polyglotte rassemble Timothée Chalamet, Adèle Exarchopoulos, Lakeith Stanfield et Song Kang-ho.
Marche à deux au petit matin : Un rencard entre Will Smith et Hong Sang-soo
Depuis le festival de Cannes 2017 (où il était membre du Jury) et sa découverte émerveillée du Jour d’après de Hong Sang-soo (plusieurs témoignages rapportent que l’acteur n’a cessé de rire durant la projection), Will Smith n’a qu’une envie : jouer dans un film du Rohmer coréen, qui s’est déjà frotté aux stars étrangères avec Isabelle Huppert (In Another Country), mais jamais américaines. Doublement déplacé, le film se passe à Hawaii, où un père de famille immature et grossier (Smith), en vacances sur l’île, s’entiche d’échapper à la vigilance de sa femme et de leur fils pour draguer lors de beuveries nocturnes sur la plage un groupe de touristes coréennes, parmi lesquelles Kim Min-hee.
Salammbô : Une fresque antique de Bertrand Bonello
Pour son projet le plus ambitieux depuis Saint Laurent, voire le plus ambitieux tout court, le réalisateur mise sur le plus haut coefficient de compatibilité avec son œuvre disponible dans l’annuaire littéraire classique : l’ultra capiteux Salammbô de Flaubert, ses temples carthaginois, ses volutes opiacées mais aussi ses scènes de bataille, exercice inédit pour le cinéaste qui compose de larges plans-tableaux débordants de figurants dans la grande tradition du péplum. Pour le rôle principal du taiseux guerrier Mâtho, le boxeur Tony Yoka. L’esclave affranchi Spendius est joué par Serge Bozon. La princesse Salammbô par la révélation de la saga Mektoub My Love, Ophélie Bau.
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