On connaît un peu Olivier Loustau comme acteur, notamment dans les films d’Abdellatif Kechiche. Une présence et un jeu à la Roschdy Zem, ou à la Lino Ventura, à la fois viril et sensible, qui font merveille dans ce qui est son premier film des deux côtés de la caméra. Il y incarne Vital, chef […]
On connaît un peu Olivier Loustau comme acteur, notamment dans les films d’Abdellatif Kechiche. Une présence et un jeu à la Roschdy Zem, ou à la Lino Ventura, à la fois viril et sensible, qui font merveille dans ce qui est son premier film des deux côtés de la caméra. Il y incarne Vital, chef d’atelier dans une usine textile en difficulté et entraîneur de l’équipe de rugby de l’entreprise. Père d’une fillette, il est confronté à l’usure du couple au tournant de la quarantaine. Il tombe dans les bras d’une étudiante venue surveiller l’ergonomie de l’entreprise avant de découvrir qu’elle est… la fille du patron.
Mixant la vie de l’entreprise, les frottements de classes sociales et une affaire d’adultère, tressant mélo, comédie et plongée dans la condition ouvrière, Olivier Loustau signe là un petit film allègre, bourré de punch, carburant à l’énergie de groupe (celui des ouvriers de fiction comme celui de la troupe d’acteurs), rappelant les réussites du genre – Les Virtuoses, les meilleurs Ken Loach ou certaines comédies italiennes de l’après-guerre.
Comme ces aînés de la comédie sociale, Loustau dose bien les différents registres de son film, ce qui lui permet d’éviter quelques pièges : l’humour garde à distance le pathos ouvriériste ou conjugal alors que la situation de la PME textile, les menaces de cadences augmentées ou de chômage chargent le film d’enjeux qui lui évitent le risque de potacherie inconséquente ou d’angélisme.
La Fille du patron repose beaucoup sur ses comédiens qui sont tous remarquables, du premier au dixième rôle, individuellement et collectivement, chacun apportant sa touche de singularité. Difficile de tous les citer mais, outre le couple Loustau et Christa Théret (masculinité vulnérable et féminité cristalline), on est content de retrouver Stéphane Rideau, Florence Thomassin, Ludovic Berthillot ou Moussa Maaskri.
Le film décline le motif de l’émancipation, qu’elle s’opère par rapport à un père, à une conjugalité épuisée, à un patron, ou plus généralement à l’ordre établi des choses et aux déterminismes. Sympathiques, solidaires et ouverts aux autres, on jurerait que ces ouvriers-là ne voteraient pas FN. Derrière les sourires du film de potes, La Fille du patron fait passer un souffle d’air frais et de liberté bienvenu. Serge Kaganski
La Fille du patron d’Olivier Loustau, avec lui-même, Christa Théret, Florence Thomassin, Stéphane Rideau (Fr., 2015, 1 h 38)
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