Le CyclisteVidéo Réalisée par Mohsen Makhmalbaf, valeur sûre du cinéma iranien, cette œuvre de 1988 est une fable sur la pauvreté, qui a le mérite de ne pas prendre de gants avec le régime des mollahs. Le Cycliste expose d’abord une situation dramatique : Nassim, travailleur immigré afghan en Iran dont la femme est hospitalisée, […]
Le Cycliste
Vidéo Réalisée par Mohsen Makhmalbaf, valeur sûre du cinéma iranien, cette œuvre de 1988 est une fable sur la pauvreté, qui a le mérite de ne pas prendre de gants avec le régime des mollahs. Le Cycliste expose d’abord une situation dramatique : Nassim, travailleur immigré afghan en Iran dont la femme est hospitalisée, est prêt à tout pour payer les frais médicaux. Il s’acharne, tel Sisyphe, à exécuter les besognes les plus rebutantes qu’on veut bien lui confier, pendant qu’à l’hôpital on refuse à son épouse, faute d’argent, l’oxygène et la nourriture indispensables à sa survie. Au départ, la situation est schématisée par des effets quasiment mélodramatiques. Puis le film décolle pour ainsi dire quand Nassim se retrouve l’enjeu d’un pari stupide qui va se transformer en vaste entreprise foraine. Réputé ancien cycliste, Nassim est engagé par un cirque pour accomplir un exploit digne du Guinness Book : pédaler sans discontinuer pendant sept jours et sept nuits. Autour de l’exploit surhumain s’organise une véritable cour des miracles, grâce à laquelle le cinéaste recrée une comédie humaine en miniature. Le cycliste devient alors aussi bien un christ à roulettes qu’un héros populaire, enjeu de tous les espoirs d’une communauté, révélateur social. Mais ça ne serait rien sans la manière follement baroque et en même temps très maîtrisée dont Makhmalbaf distribue les péripéties annexes autour de ce pivot narratif : magouilles et multiples paris qui se trament autour de l’exploit, interférences diverses qui font de la ronde lancinante de Nassim un parcours du combattant. Bien que fort réaliste dans les détails décors, situations, personnages , le film devient onirique… Impression renforcée par la postsynchronisation des voix, qui nous replonge immanquablement, comme une madeleine proustienne, dans l’atmosphère désuète du cinéma italien des années 60. Le mélange de grotesque et de tragique du dispositif a même quelque chose de fellinien. Deux exemples : le moment où le « commissaire de piste » vient tendre au champion un combiné téléphonique pendant qu’il tourne appel qui s’avère une menace anonyme ; et l’expédition de l’organisateur du spectacle pour kidnapper un autre cycliste quand les pneus du forçat de la piste sont crevés par un saboteur… Des épisodes parmi d’autres, qui insufflent une belle vitalité à cette tragicomédie, réponse potentielle du peuple iranien épuisé mais plein de ressources au rouleau compresseur du régime chiite.
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