Retrouvez ici notre sélection hebdomadaire de spectacles.
“Warm”, de Ronan Chéneau, mise en scène David Bobée
Où l’on retrouve Béatrice Dalle dans un spectacle acrobatico-littéraire créé en 2008 par David Bobée, avec Edward Aleman et Wilmer Marquez – l’un voltigeur, l’autre porteur, répondant aux injonctions de l’actrice. Présenté au théâtre du Rond-Point du 10 décembre au 5 janvier, Warm n’est pas seulement torride dans le fond. La forme n’y échappe pas et le dispositif place les interprètes à l’épreuve de la chaleur et de la lumière. Pour David Bobée, “Béatrice est une maîtresse de cérémonie. Elle met des mots sur un fantasme, elle incarne une femme seule, chez elle, en pleine canicule, qui se touche, se laisse emporter dans son imaginaire vers des corps d’hommes, des hommes qui se touchent, la touchent dans une chaleur extrême. Elle ne s’interdit rien, puisqu’on est dans le fantasme, dans le rêve, et non dans la représentation du réel. Elle peut alors tout dire, tout imaginer, tout faire.”
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“Et le cœur fume encore”, conception Margaux Eskenazi et Alice Carré
Percutant, c’est le moins qu’on puisse dire, est le deuxième volet du diptyque Ecrire en pays dominé conçu par le duo Margaux Eskenazi et Alice Carré et présenté au Théâtre Gérard Philippe du 7 au 20 décembre. Après Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre, créé en 2017, qui parcourt les courants de la négritude et de la créolité, Et le cœur fume encore s’intéresse à la colonisation de l’Algérie et à la guerre qui aboutit à son indépendance, en 1962. Très documenté, le spectacle réussit pourtant à faire de la trame de l’histoire et des témoignages recueillis le socle d’une dramaturgie qui privilégie le jeu et la fiction, l’incarnation de ceux qui ont traversé ce temps, encore tabou, d’une indépendance durement acquise.
S’y côtoient militants du FLN, leurs descendants, harkis, pieds-noirs, juifs algériens, appelés du contingent, militaires de métier, membres de l’OAS, mais aussi les paroles et les engagements des écrivains et poètes Kateb Yacine, Edouard Glissant, Assia Djebar et de l’éditeur Jérôme Lindon. L’humour n’est pas absent de la pièce, bien au contraire, que ce soit lors d’une scène du tournage du film La Bataille d’Alger de Gillo Pontecorvo, sorti en 1971 mais censuré en France jusqu’en 2004, ou la soirée des anciens combattants d’Algérie 30 ans plus tard. C’est cela qui touche le plus dans ce spectacle : l’humanité à l’œuvre portée par les acteur.rice.s, qui jouent indifféremment des rôles de femmes, d’hommes, de Noirs, de Blancs ou d’Algériens pour tenter en acte de “décoloniser et dégenrer les imaginaires”.
“Aujourd’hui”, conception Aurelia Ivan
Aller contre “la difficulté de représentation des personnes qui habitent nos villes et leurs périphéries de façon précaire” est le point de départ d’Aujourd’hui, conçu par Aurelia Ivan et présenté du 12 au 14 décembre au Collectif 12 de Mantes-la-Jolie. Mais en faisant le choix de la création sans être seulement guidé par le militantisme, Aujourd’hui se présente bien comme une proposition pour le théâtre, “une pièce qui prend l’apparence d’un collage/montage cinématographique dans lequel se succèdent un discours politique, une installation plastique sophistiquée, des récits au présent de personnes rencontrées lors des enquêtes de terrain, des citations de documents administratifs et des extraits de films d’auteur, les photographies-reportages d’une jeune fille sur ses conditions de vie dans la forêt et une installation plastique sur le vent – en référence à Pascal – car il faut bien continuer à vivre”.
“Fable pour un adieu”, d’Emma Dante
On retrouve la metteuse en scène Emma Dante au théâtre de la Colline du 11 au 22 décembre avec Fable pour un adieu, un spectacle jeune public librement adapté de La Petite sirène de Hans Christian Andersen et interprété par Elena Borgogni, Davide Celona et Stéphanie Taillandier. “Expliquer aux enfants le thème de la mort est une chose délicate, indique Emma Dante. Surtout si on a décidé de ne pas impliquer Jésus et le Paradis. Raconter une fable de façon laïque peut aider à traiter un sujet aussi difficile. La fable représente l’au-delà, ce que nous ignorons, ce que nous ne connaissons pas. Avec Fable pour un adieu, j’aimerais attirer l’attention sur ceux qui se sentent exclus, inadaptés à ce monde et qui risquent d’en mourir.” S’inspirant du conte d’Andersen, Fable pour un adieu conte l’histoire d’Agnès, une sirène inadaptée au milieu marin dont le froid la pénètre jusqu’aux os…
“Le pire n’est pas (toujours) certain”, texte et mise en scène Catherine Boskowitz
Mais autant l’envisager pour mieux l’anticiper… semble sous-entendre le titre choisi par Catherine Boskowitz pour imaginer, dans un futur proche, un chien suivant la route des camps de réfugiés, de Thessalonique à Bobigny. De la violence au quotidien vécue par les migrants aux liens qui se tissent entre les personnages, Le pire n’est pas (toujours) certain est nourri de l’expérience de la metteuse en scène, qui a passé plusieurs semaines à Thessalonique à l’accueil des réfugiés venant du Moyen-Orient. A son retour, elle constate : “Je ne savais plus faire du théâtre. Ou plus exactement, je ne savais plus si je pouvais continuer à en faire avec ce que j’avais dans la tête. J’ai alors été accueillie à Bobigny, en résidence à la MC93, et j’ai écrit cette pièce. Ecriture qui se construit aussi avec le plateau à partir du travail de jeu, d’improvisations musicales et de propositions scénographiques.” A voir du 11 au 21 décembre à la MC93 de Bobigny.
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