Si certains des enfants de Kadhafi sont devenus des pilliers du régime, d’autres se signalent par leurs frasques. Tous, par leur violence.
Faut-il, comme dans la Bible, maudire une famille et sa descendance pour l’éternité ? Non. Mais si on laisse aux enfants de Mouammar Kadhafi la circonstance atténuante de ne pas avoir choisi leurs géniteurs, les mérites de leur expertise en prévarication et en cruauté ne peuvent être attribués qu’à eux seuls. Seule exception, Hannah, fille adoptive du Guide suprême, tuée à l’âge de 4 ans en 2004 lors d’un raid de représailles américain sur Tripoli, après un attentat commandité par les Libyens contre une boîte de nuit de Berlin qui coûta la vie à un G.I. Portrait d’une tribu ombrageuse, qui pratique une solidarité familiale à géométrie variable.
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Seïf al-Islam : le “réformiste”
[attachment id=298]A 38 ans, considéré comme le premier dauphin, “Glaive de l’Islam” a longtemps figuré le visage présentable du régime. Jusqu’à ce que son père l’envoie à la télévision, le 20 février, promettre des “fleuves de sang” à son peuple en révolte. Allure mi-branchée, mi-sérieuse, il est architecte de formation et diplômé de la prestigieuse London School of Economics. Une école qu’il a dotée d’1,8 million d’euros en janvier 2010. Ce qui a créé un scandale en Grande-Bretagne, et obligé la direction de l’institution à geler ces fonds.
A la tête de la Fondation Kadhafi, ministre des Affaires étrangères officieux, Seïf a oeuvré efficacement pour donner à la Libye un vernis de respectabilité, en indemnisant les victimes de l’attentat de Lockerbie et en agissant pour la libération des infirmières bulgares, dont il a reconnu qu’elles avaient été torturées. Il a aussi été l’un des artisans du fameux voyage officiel de son père à Paris en 2007. Depuis le début de l’insurrection, ses propos et ses actes ont effacé son image, patiemment construite, de “démocrate” et de “réformiste”.
Muatassim : le putchiste
Quatrième fils de Kadhafi, Muatassim, 34 ans, est à la tête du Conseil de sécurité nationale. Il a la haute main sur l’armée, les services de renseignements et les contrats d’armement. Médecin, il est connu pour son goût prononcé pour l’alcool, qui le pousse parfois à des actes… impulsifs. Il a ainsi tenté de renverser son père en lançant ses chars à l’assaut de la forteresse du Guide. Exilé en Egypte, il a ensuite été pardonné par le colonel et l’a accompagné en 2009 lors de ses voyages officiels à Rome, Moscou et Washington, où il fut reçu avec les honneurs par Hillary Clinton. Selon les télégrammes diplomatiques révélés par WikiLeaks, il aurait obtenu de la société pétrolière d’Etat la somme de 1 milliard d’euros pour se constituer une milice privée. Jusqu’à la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, il était considéré comme le seul rival sérieux de Seïf pour la succession du colonel.
Khamis : le recruteur
A 27 ans, Khamis commande la 32e brigade, l’unité d’élite du régime. C’est lui qui était chargé du recrutement des mercenaires venus du Tchad, du Mali et du Nigeria.
Mohamed Mouammar : le footeux
A 41 ans, c’est l’aîné de la famille, né de la première épouse du Guide tombée depuis en disgrâce. Docteur en management de l’université de Liverpool, il dirige en Libye l’organisme des télécommunications, soit la téléphonie mobile, Internet et les réseaux satellitaires. Amateur de sport, il dirige aussi le Comité olympique libyen. Il a comme son frère Saadi une passion violente pour le foot. Lors d’un match en 1996 à Tripoli, son équipe avait rencontré celle de Saadi, qui l’avait ensuite accusé d’avoir gagné en achetant l’arbitre. Le ton est monté, les gardes du corps s’en sont mêlés. Bilan : vingt morts, dont l’arbitre, plus trente morts lors des émeutes qui ont suivi.
Saadi : l’autre footeux
[attachment id=298]37 ans, il a débuté une carrière de footballeur avant de tenter sa chance dans la production cinématographique à Hollywood. D’abord président de la fédération libyenne de football, il en est aujourd’hui vice-président et capitaine de la sélection nationale. En 2003, il a fait venir Diego Maradona pour lui donner des cours particuliers. Il a aussi sévi en Italie, où son père lui a offert des parts de la Juventus de Turin. Il a également joué sous les couleurs de Pérouse, où il a passé quinze minutes sur le terrain. Nommé deux fois remplaçant, il s’est fait exclure pour dopage et a écopé d’une suspension de trois ans. Colonel comme son père, il aurait été actif dans la tentative de reprise en main de Benghazi, et a affirmé dans une interview au Financial Times (dont l’Etat libyen est actionnaire), que le régime reprendrait “tôt ou tard” le contrôle du pays.
Aïcha : “Claudia Schiffer”
[attachment id=298]35 ans, seule fille de Kadhafi, “c’est la Claudia Schiffer du désert” a dit Silvio Berlusconi. A la tête d’associations caritatives et d’ONG, ce qui n’exclut pas un goût prononcé pour le luxe, Aïcha est avocate et a assuré la défense de Saddam Hussein. Au début de l’insurrection, on la disait en fuite. Il n’en était rien, à moins que son avion n’ait pas été autorisé à atterrir à Malte. “Je résiste, a-t-elle affirmé. Je veux rester auprès d’un peuple que j’aime et qui m’aime.”
Hannibal : le psychopathe
[attachment id=298]Né en 1976, il dispose d’un imposant casier judicaire et d’une immunité diplomatique. En 2001, à Rome, sortant ivre d’une discothèque, il envoie trois policiers à l’hôpital. Il n’est pas poursuivi. On retrouve sa trace à Paris en 2004, où, au volant de sa Porsche, il remonte les Champs- Elysées à contresens à 140 km/h. Il envoie ses gardes du corps régler leurs comptes aux policiers qui tentaient de l’interpeller. Un inspecteur de la BAC est blessé. Il n’est pas poursuivi. En 2005, il est condamné par le tribunal correctionnel de Paris à quatre mois de prison avec sursis et 500 euros d’amende pour avoir battu sa compagne enceinte et pour port d’arme sans permis. Impliqué dans une affaire de réseau de prostitution sur la Côte d’Azur en 2007, il est arrêté à Genève avec son épouse, en 2008, pour mauvais traitements contre deux domestiques. Il passe deux jours en détention. Cette incarcération provoque la fureur de Tripoli, qui emprisonne pour un an deux hommes d’affaires suisses. Enfin, à Londres, en 2009, Hannibal Kadhafi invoque l’immunité diplomatique pour s’opposer à l’intervention de la police, attirée par les cris de sa femme à qui il venait de fracturer le nez.
Saïf al-Arab : l’étudiant bruyant
28 ans, étudiant à Munich, il aime, tout comme son frère, les voitures de sport. Il s’est fait confisquer en 2008 sa Ferrari F340 par la police allemande, car trop bruyante. Il a quitté Munich le 10 mars dernier en laissant une dette de 900 000 euros.
Alain Dreyfus
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