Un livre pose une question essentielle au journalisme, celle du « off ».
« Donc raconter. Briser, une fois pour toutes, cette règle d’airain qui, depuis tant d’années, depuis que les journaux modèlent en partie l’opinion publique, gouverne la relation entre les journalistes et les responsables politiques : la connivence, la complicité, la compréhension mutuelle. »
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Ainsi s’ouve le livre de Nicolas Domenach et Maurice Szafran, Off – Ce que Nicolas Sarkozy n’aurait jamais dû nous dire (Fayard). On ne reviendra pas sur ce que les deux auteurs divulguent des propos off de Sarkozy. Mais sur ce qu’ils interrogent de crucial : le secret et la trahison, au coeur de notre métier. On leur a soit reproché d’avoir trahi ce « off » (ce que l’interviewé confie hors micro), soit de ne pas l’avoir trahi plus tôt dans leurs articles dans Marianne. Passionnante, cette question du secret et de la trahison concerne tous les journalistes.
Vous trahissez ? Vous n’aurez plus jamais accès à la personne interviewée, pendant que ceux qui ne trahissent pas continueront à avoir ses faveurs. Le travail de journaliste consiste-t-il aussi à s’assurer l’accès à la personnalité en question (tous domaines confondus), ou à tout dévoiler d’emblée aux lecteurs ?
[attachment id=298]Il est fréquent, à la grande frustration du journaliste, de voir la personnalité en face de lui dire des choses autrement plus vraies dès qu’il a arrêté son magnéto. Certes, dans le cas du journaliste littéraire, la donne diffère : les écrivains ne sont pas des hommes politiques, ils n’ont pas le pouvoir de faire des affaires sur le dos du pays, de faire alliance avec des dictateurs, d’envoyer des missiles en Irak. Dans le cas d’un politique tel Sarkozy qui instrumentalise le off pour assujettir les journalistes, trahir s’avère salutaire. Tout vrai journaliste se doit d’être un traître un jour.
Nelly Kaprièlian
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