Alain Badiou, lors d’un fameux débat avec Alain Finkielkraut dans Ce soir (ou jamais !), sur France 3, il y a deux ans, regrettait que la jeunesse ne dépensât autant d’énergie dans l’activisme politique que dans l’organisation d’“apéros Facebook”, alors au centre de l’attention médiatique. Trop de bière, pas assez de pierres, disait-il en substance. […]
Alain Badiou, lors d’un fameux débat avec Alain Finkielkraut dans Ce soir (ou jamais !), sur France 3, il y a deux ans, regrettait que la jeunesse ne dépensât autant d’énergie dans l’activisme politique que dans l’organisation d’“apéros Facebook”, alors au centre de l’attention médiatique. Trop de bière, pas assez de pierres, disait-il en substance.
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Or trois films américains sont récemment venus montrer une folle éruption de violence juvénile. Et tous se concluent par une même image, saisissante : un jeune homme en furie, saccageant les rues de sa ville à coups de lance-flamme (Bellflower et Projet X – comédie étonnamment réussie qui mélange grosso modo les pitchs de Risky Business et SuperGrave) ou d’autobus lancés contre des tours (Chronicle).
Signe des temps, tous trois sont tournés “à l’arrache” – que cette pauvreté soit réelle (Bellflower et sa caméra bricolée pour quelques dollars) ou simulée (Chronicle et Projet X, filmés avec de petites caméras en vue subjective mais un budget de blockbuster). Et ce mode de filmage, crade et fortement égocentré (il s’agit de filmer sa propre bulle), a évidemment pour effet d’amplifier le propos.
La colère incontrôlable qui s’exprime ici n’a pas vocation politique, contrairement à celle qui agite les rues grecques, espagnoles, israéliennes ou arabes (en partie grâce à Facebook, soit dit en passant). Non, le malaise est autre : il est sentimental. Tout ce que veulent les kids, c’est “choper des meufs”, mais hélas rien ne se passe comme prévu. Et le fantasme sexuel brimé de se voir remplacé, le temps de la fiction, par un pur fantasme geek : on dirait qu’on pourrait déplacer des objets par la pensée, on dirait qu’on ferait une fête géante avec des mannequins topless, on dirait qu’on aurait une voiture avec un lance-flamme et tout… Tremblez bogosses, l’heure de l’apéro Facebook a sonné.
Jacky Goldberg
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