Indécent d’opulence, mais totalement inefficace : un sommet de cinéma bling-bling.
Alain Chabat avait réussi avec le deuxième volet de l’adaptation cinématographique de la bande dessinée d’Uderzo et Goscinny (Mission Cléopâtre, en 2002) un prototype étonnant de blockbuster français pas trop lourd, assez inventif même, préservant l’esprit petit laboratoire déconnant des vieux Objectif Nul. Plus aucune trace de fraîcheur, de légèreté ou de loufoquerie dans cet Astérix aux jeux Olympiques, consternant d’indigence, filmant sans allant des gags mal écrits et faisant défiler les caméos de milliardaires du sport (Zidane, Mauresmo, Schumacher, Tony Parker…) en guise de misérable poudre aux yeux. Parce que le producteur du film, Thomas Langmann, a cru bon d’en cosigner la réalisation (aux côtés du malheureux Frédéric Forestier, abonné à ce type de demi-ration, puisqu’il avait déjà eu à partager le titre de réalisateur avec Alain Berbérian sur Le Boulet), imaginer une intention d’auteur, une envie, même inconsciente, d’en découdre avec une problématique personnelle est assez tentant – et constitue, il faut bien le dire, une des rares planches de salut amusantes à l’ennui terrassant que suscite cette inepte pochade. On peut donc imaginer le fils Berri projeter quelque chose de son complexe de filiation dans l’agitation du pathétique Brutus (Benoît Poelvoorde), fils déméritant de César en grosse turbulence œdipienne, qui voudrait bien succéder à son souverain de père, mais qui dilapide la puissance et le crédit de l’empire dont il hérite dans des projets pharaoniques et foirés, presque aussi mal foutus que ce film. César, c’est Alain Delon. Et c’est bien embarrassant. Il ne compose pas un personnage (en l’occurrence d’empereur romain), mais est sommé d’imiter sa propre marionnette des Guignols, parlant de lui à la troisième personne et s’autocongratulant en prenant des poses. Le plus troublant est que l’acteur semble plutôt flatté de brader ainsi son prestige et réduire son œuvre à un absurde name-dropping (à son fauve domestique, il déclare : “Il y a un guépard de trop ici.” – lol !). Dans son dernier bon film, Nouvelle Vague de Godard (1990), un personnage demandait à Delon : “Qu’est-ce que tu fais ?” Il répondait, l’œil profond, la voix lourde de regrets : “Je fais pitié.” Pas mieux.
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