Thriller mental en milieu hospitalier, mis en scène de façon sobre et efficace.
Ce titre pourrait être celui d’un polar cyberbranchouille. Or, ce quatrième film de Nicolas Boukhrief est un film noir mental situé dans le milieu médical, réalisé avec précision et sobriété, sans effets spéciaux ni affèteries à la mode. Commissaire à la retraite, Charles Boyer souffre d’Alzheimer. Son fils décide de le placer dans une clinique spécialisée.
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Dans la première scène, on voit Boyer faire sa valise : quelques vêtements, un revolver et un roman de la série des Sherlock Holmes. L’influence de Conan Doyle serait-elle problématique sur un patient souffrant de pertes de mémoire ? Toujours est-il que Boyer se met à soupçonner des choses pas nettes dans l’établissement. Des pensionnaires disparaissent, et il y aurait peut-être un serial-killer parmi le personnel médical… L’ex-commissaire se met à mener sa propre enquête. Tout le mystère du film est fondé sur l’interrogation suivante : Boyer est-il complètement paranoïaque et définitivement givré des neurones ? Ou a-t-il repéré un problème bien réel entre deux prises de tranquillisants ? Cette indécision sous-tend le film jusqu’au bout mais rappelle une célèbre leçon de cinéma d’Hitchcock sur la différence entre la surprise et le suspense : si une bombe est cachée sous une table à l’insu des personnages et des spectateurs puis qu’elle explose, c’est une surprise ; en revanche, si les spectateurs sont informés de l’existence de la bombe mais pas les personnages, c’est du suspense. Boukhrief et sa scénariste Dominique Moreau ont opté pour la surprise, et on peut se demander si le choix du suspense n’aurait pas été plus fort. Il n’empêche que, par-delà cette réserve, Cortex dispense un tas d’ingrédients intéressants : le reflet fictif de questions de société contemporaines telles que la prise en charge de certaines maladies socialement handicapantes, la responsabilité du personnel médical, l’euthanasie ; la mise en scène selon un point de vue solitaire et paranoïaque ; l’incise réussie de doses d’humour dans un univers globalement oppressant ; un casting impeccable à la tête duquel on retrouve avec plaisir un André Dussollier de routine, c’est-à-dire excellent, et une revenante magnifique, Marthe Keller, qui bouleversera forcément la génération des téléspectateurs de La Demoiselle d’Avignon. Entre les mains d’un Franju ou d’un Cronenberg, Cortex aurait été génialement terrorisant. Tel quel, c’est un très honnête et correct divertissement noir, dont la modestie stylistique est à la fois la qualité et la limite.
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