Les premiers westerns de deux as de la série B hollywoodienne : Jacques Tourneur et Budd Boetticher.
LES FILMS : Le Passage du canyon est le premier western et le premier film en couleur de Jacques Tourneur, cinéaste américain d’origine française célèbre pour trois films fantastiques en noir et blanc, produits par Val Lewton. Le plus fameux d’entre eux, La Féline, peut prétendre au statut de manifeste esthétique de l’art tourneurien : goût de la litote, de la suggestion, du murmure, subtil jeu d’ombre et de lumière, communication diffuse entre le monde des morts et des vivants. Mais Tourneur, dont le génie de la mise en scène s’illustra aussi à merveille dans le film d’aventures et le film noir, utilise les éléments du western pour proposer une œuvre complexe et inquiète, tout aussi personnelle et originale que ses films fantastiques, caractérisée par les thèmes de la peur et de l’ambiguïté, et le motif du retournement. Le chemin parcouru par les héros du film est sinueux, au même titre que leur psychologie. La grande variété des paysages naturels, sublimés par le Technicolor, fait écho aux perpétuelles évolutions des sentiments et des motivations des personnages, oscillant entre force et faiblesse. Dana Andrews trouve en Jacques Tourneur un cinéaste parfaitement apte à utiliser, après Otto Preminger, ce mélange de vulnérabilité et de violence qui fit la singularité de l’acteur à Hollywood. Tourneur ouvre avec ce film magistral sous son apparente modestie la voie au western moderne, charriant névroses et questionnements, tel qu’Anthony Mann, Raoul Walsh et Samuel Fuller le définiront quelques années plus tard. A feu et à sang est également le premier western de Budd Boetticher, futur spécialiste du genre, mais ce Cimarron Kid (titre original) ressemble davantage à un brouillon qu’à une étape importante dans la filmographie de cet héritier d’Howard Hawks, connu pour une admirable série de westerns avec Randolph Scott. Il s’agit, au contraire du Passage du canyon, d’un film rectiligne à la mise en scène claire et limpide, mené tambour battant, qui reprend l’histoire du sympathique bandit malgré lui traqué par les forces de l’ordre. Le principal défaut du film demeure Audie Murphy, le soldat de plus décoré de la Seconde Guerre mondiale devenu acteur populaire, mais au charisme incertain et au physique poupin. On est loin de la stature minérale et de la mélancolie nonchalante de Randolph Scott, acteur qui apportera beaucoup aux meilleurs westerns de Boetticher, minimalistes et lyriques.
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LES DVD : Les films sont dotés de maigres bonus souvent accessoires. Dans la même collection, on recommandera Une poignée de plomb (1969), western tardif et méconnu que Don Siegel réalisa sous le pseudonyme collectif d’Allen Smithee, car il remplaça le défaillant Robert Totten en cours de tournage. Il en résulte pourtant une oeuvre magnifique sur le vieillissement des héros, portée par une émouvante composition de Richard Widmark. A noter également, Coup de fouet en retour, bon western de John Sturges, accompagné d’un entretien passionnant avec Widmark accordé à Paris en 1994.
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