Un chef-d’œuvre méconnu d’Agnès Varda.
Le film François (le beau Jean-Claude Drouot, tout droit sorti de Thierry la Fronde) est menuisier. Mari et père heureux, il tombe amoureux d’une demoiselle des PTT sans en ressentir la moindre culpabilité. La réponse de la lucide bergère aux bergers romantiques Truffaut (Jules et Jim) et Godard (Bande à part) ? La force et la surprise de cet étonnant et très violent (une violence rentrée) Bonheur, qui fit scandale à sa sortie, résident dans le contraste entre le drame qui se joue, et la légèreté Nouvelle Vague ainsi que la luminosité renoirienne de sa mise en scène (Mozart accompagne le film de bout en bout) et, surtout, dans l’absence de jugement moral apparent porté sur le comportement de ses personnages.
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Cependant, pour qui connaît Varda et son œuvre (toutes deux plus mystérieuses qu’il n’y paraît), l’interprétation n’est guère difficile. Varda imaginait Le Bonheur comme une « pèche de plein été avec ses couleurs parfaites, mais dedans il y a un ver »… Le Bonheur est filmé en couleurs primaires, comme les sentiments de ses personnages : entiers, violents. Ce que dit le film, ce n’est pas seulement que le bonheur ne serait pas gai , mais plus radicalement qu’il est assassin. Le Bonheur, travaillé par des fantasmes morbides (le mâle est un prédateur inconscient, les morts ont tort), dresse le portrait désespéré et fasciné d’une certaine espèce d’hommes : des serial-killers/lovers, impunément.
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