Mettre en scène un biopic de Freud était risqué, mais John Huston s’en sort avec les honneurs en filmant les fameuses recherches sur l’inconscient comme un film noir.
En 1962, l’idée d’un biopic sur Freud mijotait depuis un moment : un scénario avait même été commandé à Jean-Paul Sartre. Sortant du succès des Désaxés, et surtout d’une longue pratique freudienne, John Huston hérita du projet. A l’arrivée, il ne reste quasiment rien du scénario de Sartre, qui n’est même pas crédité au générique. Le récit est relativement didactique mais la grande idée de Huston, c’est de filmer les recherches de Freud sur l’inconscient comme un film noir. Le réalisateur s’appuie sur le magnifique noir et blanc de Douglas Slocombe, qui va jusqu’à évoquer l’expressionnisme allemand lors de stupéfiantes scènes de rêve sur- ou sous-exposées. Chaque étape des investigations de Freud, des symptômes de l’hystérie étudiés à Paris avec Charcot jusqu’aux cas les plus célèbres qui lui permettent de mettre au jour la sexualité infantile et le complexe d’Oedipe, sont autant de scènes fortes que Huston filme comme un suspense haletant. Tel un détective privé solitaire, l’analyste viennois est isolé, moqué voire méprisé par ses confrères, et ne peut compter que sur lui-même – et sur son épouse Martha. Le film a beau être encadré par un prologue et un épilogue lus par Huston lui-même, où il met les découvertes de Freud au même niveau que celles de Copernic ou Darwin, on sent que ce qui passionne le cinéaste ici est moins la réussite d’un génie que la solitude d’un homme dans l’adversité, mobilisé par la découverte de la vérité. Il faut voir ce film passionnant – d’autant que Monty Clift y est remarquable – qui souffre injustement d’une mauvaise réputation.
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