Cet amour-là

ECRIRE, ECRIRE, ECRIRE > Josée Dayan adapte le livre de Yann Andréa sur
sa relation avec Marguerite Duras. Une excellente surprise.
« Quand on est intelligent, on est intelligent sur tout : pour faire des livres, du jardinage, l’amour… » Cette phrase de Marguerite Duras entendue dans le film vaut pour le film lui-même, qui a l’intelligence de ne pas mettre la Duras écrivant au-dessus de la Duras du quotidien. En adaptant Yann Andréa, Josée Dayan montre au contraire que l’écriture de Duras naît de son quotidien. Mieux : que l’exigence de Duras dans l’écriture vient de son exigence au quotidien, que ce soit pour choisir une marque de limonade, ou pour interroger le regard d’une infirmière que son corps lourd pourrait faire croire vaincue, mais où l’écrivain détecte un reste d’éclat. Ecrire, c’est ce qu’il y a de plus important pour Duras. Conséquence : l’écriture br le tout
le reste, le vampirise, le consume. Le film de Josée Dayan parvient
à montrer ça, sans sacraliser pour autant le moment de l’écriture. Duras parle, Yann Andréa tape à la machine, la bouteille de vin est peut-être posée avec un peu trop d’insistance sur la table, mais à part ça, en toute simplicité, la relation entre l’un et l’autre est posée. Andréa est venu à Duras parce qu’il admire son écriture. Elle se sert de cette admiration, tout en s’emportant qu’il aime l’écrivain plus que la femme, tout en l’injuriant (la phrase citée au début de ce texte fait suite à un reproche récurrent adressé à Andréa : celui d’être nul, « zéro pointé »). Jusqu’à la sortie de ce film, on n’attendait rien de Josée Dayan. Cet amour-là est pourtant à l’évidence une réussite. Jeanne Moreau y est pour beaucoup, elle qui a manifestement compris le projet, jouant davantage l’esprit de Duras que la lettre.

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