Polanski repense le film de vampires en le tournant en dérision, et en mêlant la peur à la loufoquerie. En 1967, après dix ans de suprématie de la compagnie Hammer sur le cinéma fantastique, après la résurrection du vampirisme dans son pays d’origine, la Grande-Bretagne, avec les Dracula de Terence Fisher incarnés par Christopher Lee, […]
Polanski repense le film de vampires en le tournant en dérision, et en mêlant la peur à la loufoquerie.
En 1967, après dix ans de suprématie de la compagnie Hammer sur le cinéma fantastique, après la résurrection du vampirisme dans son pays d’origine, la Grande-Bretagne, avec les Dracula de Terence Fisher incarnés par Christopher Lee, Roman Polanski détourne le genre avec son sens inné de la dérision sarcastique. Le titre original donne le ton : « Les intrépides tueurs de vampires, ou Pardonnez-moi, mais vos dents sont plantées dans mon cou ». Polanski se livre à un exercice subtil en jouant sur plusieurs tableaux. En effet, Le Bal des vampires est a priori une parodie loufoque de tous les clichés, ainsi qu’une analyse du discours latent de ce cinéma (les connotations homosexuelles), avec en sus un récit au premier degré, proprement angoissant. En jonglant habilement avec le vrai et le faux, avec le suspens et le carton-pâte, Polanski compose un spectacle proprement baroque, auprès duquel le Dracula hyper sophistiqué de Coppola ressemblera à un exercice décoratif, à une pub pour parfum. C’est que Polanski a su intégrer la part primitive de cette mythologie para-démoniaque,
en superposant le style archaïque du Nosferatu de Murnau et du Vampyr de Dreyer au visuel très plastique des films Hammer. Mais c’est plus qu’une synthèse réussie, c’est une réinvention du cinéma fantastique et de terreur par la caricature. En détournant les conventions, Polanski redonne de la vérité à ce genre très (trop) codé, donc figé : le vampire n’a pas peur des crucifix, mais il se casse les dents en mordant une Bible. Après ça, Dracula n’a plus été que l’ombre de lui-même.