La 25ème édition du Festival du film indépendant américain s’est close le 25 janvier dernier. Du grand prix Push (photo) au contingent français, en passant par une adaptation de Brett Easton Ellis, retour sur le palmarès et les événements marquants de Sundance 2009.
Il faut y arriver à Park City, improbable station de ski enneigée et ensoleillée au nord de l’Utah, qui accueille en chaque début d’année depuis 1985 le Festival du film indépendant américain. Son créateur, et pas des moindres, est Robert Redford. Des réalisateurs comme Quentin Tarantino, Steven Soderbergh ou encore Jim Jarmusch y ont fait leurs premiers pas et ce festival peut se révéler un vivier de nouveaux jeunes talents.
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Le Sundance Festival a réuni du 15 au 25 janvier producteurs, réalisateurs, acteurs, diffuseurs et journalistes du monde entier autours d’une sélection de 118 long-métrages dont 91 premières mondiales. Ces films venaient de 21 pays et comportaient 42 premiers films dont 28 en compétition. Ici, l’ambiance est décontractée, les « stars » plus qu’abordables en jeans et grosses chaussures de neige, les rencontres conviviales. Les projections autres que les projections presses y sont publiques si l’on fait tout de même partie des chanceux à avoir réussi à acheter une place. Les salles de cinéma comme le Eccles Theatre, le Racquet Club ou l’Egyptian Theatre qui parsèment la ville sont combles et le public expressif et bienveillant durant les projections.
Entre l’investiture de Barack Obama et la crise économique, le festival, qui fêtait son 25ème anniversaire, a pris une résonance toute particulière. Une question récurrente s’est posée : les films indépendants peuvent-ils survivre dans le contexte économique actuel ? Geoffrey Gilmore, Président du festival, s’avoue optimiste, les candidatures au Sundance n’ayant jamais été aussi nombreuses et la sélection des films aussi exigeante. En définitive, contre tout vent contraire, « ce qui est ultimement en jeu c’est l’utilisation créative de la liberté dans une société ouverte » comme le résume le slogan du Sundance Institut.
Les autres lieux-clef du festival ainsi que les nombreuses fêtes se concentrent sur Main Street, seule rue animée de la station dans un univers de Far-West. La Sundance House, la Film Maker Lodge ou encore le Sundance Music Café sont chapeautés par le Sundance Institut – organisme à but non-lucratif qui organise le festival et finance grâce à de nombreux sponsors le film indépendant. Nous avons pu y croiser à l’improviste Damien Rice en concert.
Le palmarès du festival a puisé parmi les quatre catégories principales de la compétition : la compétition US Dramatic and Documentary et la compétition World Dramatic and Documentary.
Le film Push de Lee Daniels (photo) avec Mariah Carey en travailleuse sociale et Lenny Kravitz, favori avant sa récompense, a reçu le grand prix du jury pour la fiction américaine ainsi que le prix du public. Il raconte l’histoire rédemptrice de Precious Jones, adolescente de Harlem à qui rien ne sourit. Elle arrive avec créativité, humour et férocité à surmonter les obstacles et trouver sa propre voie.
Côté documentaire américain, le grand vainqueur est We Live in Public (photo ci-dessus) de Ondi Timoner – déjà primée en 2004 pour le son rockumentary autour de Dandy Warhols et Brian Jonestown Massacre, Dig ! – qui traite de l’impact révolutionnaire d’Internet sur les relations humaines au travers des yeux et de la vision du pionnier d’Internet, Josh Harris. Espérons qu’il ne faudra pas attendre un an pour découvrir ces films en France… La sélection internationale a quant à elle récompensé une comédie dramatique chilienne, The Maid (La Nana) de Sébastien Silva, et un documentaire britannique, Rough Aunties dirigé par Kim Longinotto sur les enfants de Durban en Afrique du Sud.
Les films US à retenir
De la sélection de fictions américaines, on peut retenir la variété et la richesse des thèmes traités. On peut citer le très caustique Big Fan de Robert Siegel, le premier film de John Krasinski, Brief Interviews with Hidous Men, tiré d’une nouvelle de David Foster Wallace, ainsi que celui de Cary Joji Fukunaga, Sin Nombre et Paper Heart de Nicholas Jasenovec. À noter aussi un film qui a fait du bruit chez les distributeurs : le documentaire de Louie Psihoyos, ancien photographe du National Geographic, The Cove (photo ci-dessus) sur le massacre des dauphins au Japon.
Les Premières, hors compétition et très attendues, ont présenté un cinéma américain plus grand public.
On peut retenir I Love You Phillip Morris (photo ci-dessus) de Glenn Ficarra et John Requa, avec comme producteur exécutif Luc Besson. Jim Carrey et Ewan McGregor jouent le rôle de deux co-détenus dans une prison du Texas qui tombent follement amoureux l’un de l’autre. The Informers, adapté du livre éponyme de Brett Easton Ellis, sur le Los Angeles des années 80 avec sa flopée d’anciennes stars hollywoodiennes un peu passées comme Mickey Rourke, Kim Basinger ou Winona Ryder traite du thème de la drogue et du sida. Kevin Spacey, quant à lui était présent au festival pour deux films qui ont fait sensation : The Shrink de Jonas Pate qui montre une autre face d’Hollywood à travers l’histoire d’un psychiatre pas comme les autres ; et c’est lui aussi qui fait la voix du robot « émoticôme » dans le film de science-fiction de Ducan Jone, Moon.
Et les Français ?
Deux films français étaient présentés dans le cadre du festival. Cliente de Josiane Balasko a été rebaptisé pour l’occasion French Gigolo et nos amis les Grolandais ont gagné avec Louise-Michel le Prix spécial du jury dans la catégorie fiction internationale.
Surprise aussi de retrouver une française ou plus exactement une franco-américaine peu ou pas encore connue en France dans la sélection US Dramatic pour son premier long métrage Cold Souls (photo ci-dessus) coproduit par ARTE. Sophie Barthes, rencontrée dans sa suite au Marriott Hotel qui fait aussi office de Headquater du festival, a réalisé là un film de science-fiction poétique incarné admirablement par Paul Giamatti dont on se souvient la prestation dans Sideways sur la route des vins en Californie. Le film se passe entre New York et Saint Petersbourg et raconte l’histoire d’un homme en crise qui se fait extraire son âme. Imprégné par le mouvement surréaliste, ce film manie des concepts philosophiques tout en restant envoûtant et plein d’humour. Alphaville de Godard, Love and Death de Woody Allen, ainsi que la littérature russe (Dead Souls de Gogol), Boris Vian ou Dali ont inspiré sa réalisatrice. Elle a d’ailleurs été nommée par le Film Maker Magazine comme faisant partie des « 25 nouvelles personnalités du cinéma indépendant ».
Sophie Verrier
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