Produit par les Dardenne, le portrait subtil d’un groupe d’action gauchiste italien des années 70.
Le terrorisme – surtout celui des années de plomb – n’en finit pas d’inspirer le cinéma (nostalgique ? critique ?), au point de constituer un genre en soi, une variante plus historique et politique du film de gangsters.
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En découlent deux types d’approche : l’une rivée au temps de l’action terroriste et l’autre liée à l’après-coup. La question qui se pose n’est plus “pourquoi, comment et jusqu’où agir ?” (Buongiorno, notte de Marco Bellocchio) mais “comment vivre avec ce qu’on a fait ?”, que l’on ait purgé sa peine (La Seconda Volta de Mimmo Calopresti) ou que l’on continue à vivre dans la clandestinité, comme dans les superbes A bout de course de Sidney Lumet et Contrôle d’identité de Christian Petzold.
Concentré sur les agissements d’une importante cellule terroriste d’extrême gauche dans l’Italie des années 70, La Prima Linea (nom du groupe en question) a pour singularité d’entremêler ces deux temps, le pendant et l’après-terrorisme, et nous donne l’étrange impression d’être un peu à côté des combats menés par les personnages.
Il développe ainsi une distance réflexive, parfois subtile, parfois trop clignotante, qui exclut toute forme d’héroïsation douteuse pour mettre le doigt sur la dépossession de soi et le gâchis engendrés par cette implication extrême.
Le film (produit par les frères Dardenne) s’ouvre sur l’incarcération d’un des membres de cette faction, dont le témoignage face caméra amorce un long flash-back sur son passé terroriste.
Face à ce beau visage d’ange déchu, au regard bleu surnaturel toujours un peu absent, on se sent en présence de la tristesse incarnée, d’un homme plus spectateur qu’acteur de sa propre vie.
Cette dimension fantomatique, qui donne son épaisseur au film, on la doit en grande partie à la puissance du jeu, tout en économie, de Riccardo Scamarcio (Eden à l’Ouest), parfaitement relayé et soutenu par l’incandescente Giovanna Mezzogiorno (Vincere) dans le rôle de sa compagne.
On regrette néanmoins que la mise en scène de Renato De Maria, dont on apprécie la justesse de reconstitution, son réalisme un peu froid, presque melvillien dans ses meilleurs moments, ne se fasse pas plus confiance et tombe au final dans l’écueil d’un didactisme lourd via un mea culpa moralisateur qu’elle avait amplement les moyens d’éviter.
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