Quand il est tenté par la trivialité à la coréenne, le cinéma nippon ne peut pas s’empêcher d’esthétiser la banalité.
Le label “oscar du meilleur film étranger” accolé à ce film a quelque chose de rebutant. Si un film japonais obtient un affidavit yankee, c’est que quelque part il y a de l’homogénéité, un enrobage sucré façon M&M’s, qui permet d’avaler la singularité asiatique. Et là ça ne manque pas…
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Le film démarre bien, partant d’un concept proche de Six Feet under : l’humour pompes funèbres. Quoi de mieux pour visiter “toute la gamme des émotions, du rire aux larmes” (dossier de presse) que le rituel de la mise en bière, dramatique pour les membres de la famille du défunt, et souvent désopilant vu de l’extérieur ? Bref, le film commence plutôt bien, par un flash-forward qui nous fait entrer dans les nouvelles activités d’un violoncelliste au chômage, qui est rentré dans son village natal où il n’a pas eu d’autre choix que de devenir croque-mort. On nous plonge d’abord dans le décor hivernal de la province, puis en pleine séance de travail – lequel, aussi incongru que cérémonieux, consiste à faire la toilette des morts devant la famille éplorée et à pomponner les macchabées pour l’au-delà. Le processus s’avère plaisant à voir, d’autant plus que le héros, Daigo, qui débute dans le métier, en découvre des aspects inattendus. Il y a une sympathique trivialité du sujet et du contexte, plus fréquente dans le cinéma coréen, qui aime plus le réel. Elle est exacerbée par le décor hivernal et par l’humanité trop humaine des personnages. Hélas, le film n’a pas la patience de fouiller son sujet, cette humanité croupissant dans une confortable médiocrité, et se croit obligé de le transcender (= le surplomber) avec une foule de séquences onirico-publicitaires, comme celles où Daigo, repris par son vieux démon, la musique, se déchaîne sur son violoncelle dans les champs, filmé en contre-plongée, diaphanisé par les fondus-enchaînés, et englué dans la soupe symphonique de Joe Hisaishi – plus convaincant lorsqu’il plagiait Satie chez Kitano. Œuvre sans grande portée, donc, qui joue avec une virtuosité trop mécanique sur les cordes sensibles. Il manque à Takita, issu de l’école officieuse du pinku eiga (porno soft nippon), tout comme Kiyoshi Kurosawa ou Kôji Wakamatsu, le grain de folie de ses collègues. Les mêmes causes ne produisent pas toujours les mêmes effets.
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