La rage de trois ados de la banlieue de Moscou.
On reste un peu prudent avec ce premier film. Il a toutes les apparences du brûlot cru et brut de décoffrage sur la jeunesse russe dans tous ses états, de préférence destroy, éructante et mal polie. Mais, chat échaudé craint l’eau froide. En effet, à la fin ds années 80, lors d’une mini-nouvelle vague coïncidant avec la perestroïka gorbatchévienne, deux œuvres aussi mal élevées, La Petite Véra de Vassili Pitchoul, et Bouge pas, meurs, ressuscite de Vitali Kanevski, avaient déjà défrayé la chronique. Ils mourront tous sauf moi ! semble être du même ordre, mais cette fois on ne va pas crier au miracle. Par ailleurs, ce film correspond à un sous-genre hollywoodien, dont le clou est la fête de fin d’année du lycée, le high school prom film (exemple : Carrie de De Palma), apothéose adolescente aux airs d’apocalypse.
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Ici, le schéma est proche du modèle : mêmes scènes, mêmes délires, mêmes dilemmes, mêmes drames. A ceci près que c’est un film russe tourné dans la zone moscovite, donc un peu plus impitoyable. La cinéaste connaissant le sujet et le terrain sur le bout des doigts, puisqu’elle y habite, elle y a filmé en roue libre trois excellentes actrices – plus âgées que leurs personnages d’ados de 16 ans (cela ne se voit pas) –, caméra à l’épaule, en entrant systématiquement “dans le chou du plan”, comme disait Pialat.
Histoire conflictuelle de lycéennes prêtes à tout pour sortir de l’enfance à l’occasion de la boum de l’école, quitte à y perdre des plumes et toute leur innocence, brutalement. Une œuvre dure, vernaculaire (car très locale), qui a le défaut de ne pas dévier d’un iota d’un programme très tracé. Au point que, lors d’une des séquences finales, on montre alternativement chacune des trois héroïnes humiliée, tabassée, violée et/ou soûlée… Ce martèlement du constat par le montage revient à transformer en généralité (sociologique) les cas de ces ados de 15-16 ans au lieu de les singulariser. Donc à les banaliser. C’est un peu le défaut du film, qui joue sur la même note d’un bout à l’autre. En même temps, cela lui confère l’unité et la concentration qui faisaient défaut à un équivalent français, Regarde-moi d’Audrey Estrougo (2007), autre fiction autobiographique sur des ados banlieusardes. Espérons que Valeria Guermanica, qui a le don d’aller droit au but, saura surpasser cet instantané prometteur sur la génération Poutine, jeté comme un cri de rage.
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