Aronofsky revitalise son cinéma en collant à la peau tannée d’un Mickey Rourke bouleversant.
Jusqu’à présent, les films de Darren Aronofsky (Pi, Requiem for a Dream, The Fountain…) se caractérisaient par son goût pour le religieux kitsch. La surprise de The Wrestler réside dans son absence de grandiloquence, sa façon de se couler sans prévenance et avec punch dans un cinéma de genre réaliste.
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The Wrestler raconte l’éternelle histoire d’un sportif sur le retour (ici un catcheur) qui va décider de mener un dernier combat avant de mourir, parce que c’est sa vie, son destin. Le film de Darren Aronofsky n’évite pas certaines conventions liées au genre du film de combats sportifs : héros christique, amours compliquées avec une strip-teaseuse au grand cœur mais scrupuleuse, retrouvailles maladroites avec une fille abandonnée à son sort pendant vingt ans… Les histoires secondaires pourraient presque nous détourner de ce qui rend le film passionnant : son aspect documentaire.
Le catch est une discipline très particulière, à mi-chemin entre le sport et le spectacle, où les adversaires feignent de l’être. Au catch, comme dirait l’autre, le seul ennemi, c’est soi-même, la dose de coups que l’on se montre capable d’encaisser. L’environnement étrange que nous fait découvrir The Wrestler, cet univers survitaminé, ultraviril, bourré au rock, à la sueur et aux amphètes, est profondément touchant : dans la coulisse, les catcheurs se respectent, obéissent à un code d’honneur quasi chevaleresque. Contrastent ainsi à l’écran la fragilité du lutteur vieillissant et l’immuabilité d’un art qui continuera après sa mort, la grande violence exercée sur les corps et la tendresse qui les lie entre eux.
Le film est en outre un documentaire déchirant sur Mickey Rourke. Parce que son corps porte les traces de toute la détresse du monde, et parce qu’il les arbore avec humour et juvénilité. Parce que lorsqu’il retire une à une les agrafes que l’un de ses adversaires lui a plantées dans le torse, nous ne sommes justement plus dans le chiqué. Le corps plastifié de Rourke est une immense blessure qui n’a jamais le temps de se refermer avant le prochain coup. Le corps de Rourke est comme le visage de Montgomery Clift, la peau ravagée de Michael Jackson ou le collier tatoué d’Isabelle Adjani, tous ces “écorchés vifs” magnifiques déchirés entre le désir d’exhiber leurs tortures intérieures et celui de les cacher.
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