Un gang de teenagers dévalise les villas de ses stars préférées sous l’œil mi-envieux, mi-sarcastique de Sofia Coppola.
A quoi rêvent les jeunes filles ? Comme Musset, Sofia Coppola et Harmony Korine ont leur idée sur la question. Et leur réponse varie à peine : jouir de tout, prendre beaucoup de drogue, que la vie prenne le tour d’un show de téléréalité sans fin.
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Mais ce qui les intéresse, ce n’est plus tellement le “à quoi”, mais plutôt la notion même de “rêve”. Pourquoi ni les filles de Spring Breakers, ni celles, pourtant un peu moins délurées, de The Bling Ring n’ont plus le goût à seulement rêver mais entendent bien faire plier la réalité, refusent absolument que ce à quoi elles rêvent ne soit justement qu’un rêve.
Fou furieux chez Korine, plus malicieux et “Club des cinq” chez Coppola, le passage à l’acte est la question centrale des deux films. Et au final, leur point commun le plus flagrant est de ne pas trop savoir ce qu’ils en pensent. Ou plutôt de refuser d’en penser quelque chose de définitif, d’osciller sans cesse entre le constat ahuri d’un ultravide contemporain et la fascination presque envieuse pour cette voracité de la jeunesse qui ne s’embarrasse de pas grand-chose et prend ce qu’elle veut où cela se trouve.
Sofia Coppola se veut tout de même un peu plus sociologue qu’Harmony Korine. Elle esquisse des pistes explicatives, parfois un peu appuyées (en représentant par exemple l’état de délitement de certaines des familles des petites voleuses), probablement le fruit de l’enquête journalistique de Vanity Fair dont elle s’est inspirée. Elle réussit à camper aussi quelque chose d’assez fort sur le rapport à la propriété, notion totalement battue en brèche par internet.
Les filles (et le garçon) du Bling Ring vivent dans un monde de l’accès perpétuel, où ce qui a été vu sur internet – les fringues des people, leurs maisons, leurs bijoux – devrait pouvoir aussi se télécharger dans le réel. Et de fait, entrer chez les stars de Beverly Hills (où rien n’est cadenassé, où les clés sont sous le paillasson) pour leur piquer leurs Louboutin est une manip aussi simple qu’un download.
Sofia Coppola traite avec beaucoup d’ironie son petit gang amateur, souvent confondant de naïveté (le gag le plus drôle : ils affichent sur Facebook le fruit de leur larcin). Mais c’est la tendresse qui l’emporte, et aussi une certaine légitimation critique de leur comportement. Puisque l’industrie du luxe constitue comme objet de désir ultime et universel une paire de chaussures à semelle rouge, quoi de plus naturel que de s’en emparer par n’importe quel moyen ?
“Let’s go shopping”, exulte une fille dans la première séquence, avant que sur un pogo endiablé son gang ne ruine
le dressing de Paris Hilton. Nul doute à ce moment que le film jouit avec elle, et avance même, de façon très malicieuse, que dévaliser le luxe est la meilleure façon d’en jouir.
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