Victor Hugo en télé-crochet. Le nez dans la poussière, c’est la faute à Tom Hooper.
Au Royaume-Uni et aux États-Unis, Les Misérables sont orphelins
de Victor Hugo, devenus porte-drapeau de la comédie musicale
à l’affiche depuis la nuit des temps (trente ans en fait).
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L’adaptation cinéma voit grand avec son casting étoilé, son réalisateur oscarisé. L’intro épique, où des forçats remorquent à la main un navire, est trompeuse car Hooper rétrécit vite le champ sur ses interprètes, filmés en gros plan comme au télé-crochet. Avec une caméra inutilement brinquebalante, c’est l’unique choix de mise en scène.
Comme si le cinéaste se croyait toujours orthophoniste dans Le Discours d’un roi, à tester la diction de ses stars, à presser l’émotion sur le nez de ses acteurs/chanteurs pour de vrai, garantis sans postsynchronisation.
Musicalement, les épreuves pathétiques de Valjean, Fantine, Cosette et cie sont lyophilisées en variétoche braillée-parlée. “Entendez-vous le peuple chanter ?”, scande une chanson. Oui, à moins d’être sourd.
Une fois habitué, on note que Hugh Jackman/ Valjean s’en sort pas mal dans le registre “je chante constamment l’air peiné”. Mais c’est l’inconnue Samantha Barks/Éponine Thénardier qui sauve la mise. La meilleure interprète, touchante sans être gluante – avantage, elle jouait le rôle dans la version scénique.
Ailleurs, ces Misérables sont un torrent lacrymal qui balaie tout sens (pourquoi les barricades de l’insurrection républicaine de 1832 à Paris ? Parce que), et cloue le spectateur à terre : c’est la faute à Hooper.
On est noyé mais l’entreprise prend souvent elle-même l’eau : c’est la faute à Russell Crowe. Son Javert-minator, flic programmé pour servir la loi, mais pas à l’abri du bug, est amusant comme un méchant de péplum. Qui ne chante pas très bien. Avec lui, on entre involontairement dans une autre comédie musicale filmée, façon “Chantons sous la douche” : Mamma Mia. Elle au moins ne se prenait pas au sérieux.
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