La Pianiste Le dernier film de Michael Haneke, couronné de trois prix à Cannes en mai dernier, fut précédé de rumeurs sulfureuses. Prévenus de l’œuvre d’Haneke, on attendait de voir. Si l’on est en droit de ne pas adhérer à son système de représentation rigide, austère, réfrigérant, preneur d’otage diront certains, on ne peut nier […]
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Le dernier film de Michael Haneke, couronné de trois prix à Cannes en mai dernier, fut précédé de rumeurs sulfureuses. Prévenus de l’œuvre d’Haneke, on attendait de voir. Si l’on est en droit de ne pas adhérer à son système de représentation rigide, austère, réfrigérant, preneur d’otage diront certains, on ne peut nier une écriture singulière, questionnant notre époque, et des parti-pris esthétiques radicaux en relation avec son engagement politique. Mais dans La Pianiste, la mise en scène d’Haneke semble être un pesant dispositif où chaque élément n’existe qu’en fonction de sa force d’impact programmée, dans une logique d’ensemble de la performance.
Névrosée jusqu’à la moelle, Erika est le jour professeur de piano dans un conservatoire viennois, lèvres et chignon serrés, la quarantaine, elle habite seule avec maman dans un très vieil appartement et on connaît la suite, presque comme dans la chanson. Le soir venu, elle va traîner en douce dans les peep-show, et désamorce ses folles frustrations à coups de scènes mentales sado-masochistes.
Conflit ravageur entre image de soi extérieure et image privée, scène de mutilation du sexe féminin, profils d’Huppert à la fenêtre, il plane fortement sur La Pianiste l’ombre de Bergman, de Persona à Cris & chuchotements. Mais alors que chez le cinéaste suédois, la scène d’automutilation renvoit à tout un imaginaire intime, chez le cinéaste autrichien, elle ne renvoit qu’à Bergman. Aucune résonance ne vient amplifier ce qui nous est montré avec ostantation, on en reste à la maigre manifestation de signes : Huppert et son masque verrouillé par la souffrance, Huppert statue renversée dans le sperme, le vomi, le sang.
On est dans la démonstration clinique et désincarnée. Puis, soudain le film vire au Grand Guignol, avec la scène où Walter, un jeune pianiste sur lequel elle a fixé ses fantasmes, prend Erika de force dans son appartement, tandis que maman Girardot échappée d’Au théâtre ce soir, enfermée dans le placard, vocifère en tapant du poing sur la porte. Alors on écoute Schubert.
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