Dans son deuxième long métrage, Michael Haneke montre que ce ne sont pas les images violentes qui sont dangereuses, mais plutôt leur capacité à nous fasciner.
Ça commence par une mise à mort filmée en vidéo. L’image n’est pas très bonne. On traîne un cochon dans une cour. Horrible et fascinant spectacle d’une agonie, là, directement sous les yeux. Retour en arrière, ralenti sur le coup fatal.
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Dès les premières images de Benny’s Video, nous voilà acculés à une position de fascination face à la mort en gros plan. Benny, lui, éprouve un certain plaisir à passer cette image en boucle. Cet adolescent, fils unique gâté de la bourgeoisie viennoise, ne s’intéresse plus au monde qu’à travers des images. Celles de la télévision allumée en permanence, celles de son caméscope avec lequel il filme tout et n’importe quoi, comme l’abattage de ce porc. Immergé dans son monde virtuel, il commet un meurtre de sang-froid.
Enième exposé sur les dangers de la télé pour les ados, avec violences à la clé ? Au contraire. Sans jamais avancer la moindre explication, Michael Haneke se borne avec une distance glaçante à l’enchaînement logique et tragique des faits. Il ne montre pas la violence, il la suggère, et nous la laisse imaginer en la maintenant hors champ. Du meurtre filmé en plan-séquence, on ne voit rien. Ne nous parviennent que des bruits étranges, des couinements, des fragments.
A la différence de Benny, le spectateur prend alors conscience de ce qui se passe réellement un réel qui finit par devenir étouffant. Notre fascination horrifiée se porte sur l’image impassible de ce visage juvénile, d’adolescent frais, innocent, totalement inexpressif, égaré dans son lointain intérieur, indifférent au bien et au mal.
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