Quelques mois avant que ne paraisse le successeur du sublime The Trials of Van Occupanther, Tim Smith et Eric Pulido étaient à Paris pour présenter leur nouvelle collection résolument automne-hiver, le beau The Courage of others. Interview.
Fortement imprégné par le folk anglais pour le son et le cinéma mystique russe pour l’image, The Courage of others est l’un de ces disques qui intimident, bouleversent, et apparaissent un peu plus intenses à chaque écoute. C’est aussi l’album idéal pour illustrer ce sentiment impalpable et pourtant si galvaudé qu’est la mélancolie. Interview de Tim Smith et Eric Pulido.
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Chacun de vos albums est une démarcation du précédent, c’est d’autant plus vrai sur celui-ci.
Tim : Nous sommes parti du principe qu’il aurait été assez simple de refaire un disque dans la lignée de The Trials of Van Occupanther, mais que nous avions effectivement envie d’autre chose. Il se trouve que dans l’intervalle entre les deux disques nous avons énormément écouté de folk anglais des années 60 et cette musique nous a littéralement envoûtés. Nous ne connaissions auparavant pas grand chose à Pentangle ou Fairport Convention et leurs disques nous sont apparus comme des révélations. Le folk anglais est très distinct du folk américain dans le sens où il puise une grande partie de son inspiration dans la musique médiévale. Il n’y a pas de Moyen-age aux Etats-Unis, ce ne sont donc pas les mêmes racines même si il existe une ferveur commune.
Quels sont les disques en particulier qui vous ont introduits au folk britannique ?
Eric : Essentiellement ceux de Fairport Convention, le titre Fotheringay notamment qui nous a énormément influencé, et les albums de John Renbourn, le guitariste de Pentangle dans sa période solo. Nous n’étions pas complètement en terre inconnue, car à l’origine nous étions des musiciens de jazz, une musique dont on retrouve certains éléments dans le British Folk. Notamment dans l’utilisation d’instruments traditionnels comme la flûte, jouée comme s’il s’agissait d’un saxophone. Nous avons tenté d’apporter notre propre expérience à cette musique née bien avant nous, en essayant de capturer l’esprit sans forcément chercher à en retrouver le son exact.
Cette influence du folk anglais a-t-elle eu une incidence sur l’écriture des textes ?
Tim : Sans doute, disons qu’à la différence du précédent album nous n’avons pas écrit les paroles en partant du point de vue d’un personnage. L’écriture sur celui-ci est beaucoup plus atmosphérique, nous avions notamment en tête des peintures représentant des paysages, des vallées, avec une lumière bien particulière que nous avons tenté de retrouver également dans la production de l’album.
Il y a un sentiment de mélancolie très fort qui échappe de ces nouvelles chansons, était-ce l’état d’esprit dans lequel vous vous trouviez en les enregistrant ?
Tim : Pas nécessairement, mais c’est la direction qui s’est imposé à nous, sans doute l’a-t-on emmenée jusqu’au paroxysme sur certains titres comme Acts of man, sans pour autant nous sentir accablés de tristesse en l’enregistrant. Une chanson, c’est toujours une interprétation exagérée d’un sentiment, et en ce qui concerne la mélancolie le seul piège est de sombrer dans l’auto-apitoiement, ce qui n’est pas du tout le propos de cet album. Simplement, la musique que nous écoutions à l’époque nous a conduit vers ça, c’était un territoire assez riche et intéressant à explorer. La prochaine fois, promis, on fera un effort pour apparaître sous un jour plus souriant (rires).
A l’image de la précédente, la pochette de The Courage of others est assez intrigante, quelle en était l’idée ?
Tim : Nous aimons beaucoup Andreï Roublev, le film de Andrei Tarkovski, et cette image est une sorte d’hommage au mystère et à la magie de ce film. Nous avons conscience que les gens peuvent plutôt s’attendre à un disque de Drone ou de Métal-gothique en la voyant mais pour nous son côté monastique colle à merveille avec l’atmosphère assez recueillie des chansons.
Eric : Le cinéma Européen, en tout cas ce que nous en connaissons à travers des metteurs en scène comme Fassbinder ou Kieslowski, est une source d’inspiration plus grande pour nous que le cinéma hollywoodien. Il y a un grain, un mouvement et une puissance dans leurs films qui correspond à l’idée que nous avons de notre propre musique.
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